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Un sourire d’enfer 13

février 21, 2023

Un sourire d’enfer  13

J’ai essayé de faire retomber sur moi tous les soupçons, en croyant qu’on ne toucherait pas à un journaliste, mais en réalité, je faisais dans mes culottes.

Malgré mes efforts, j’étais tout au plus un allumeur de conscience comme tout bon journaliste.  Mais, je prenais mon rôle très au sérieux.  J’en étais même prisonnier. Plus j’allais, plus j’étais fanatique. Mais, cela était dû surtout au contexte : la guerre entre les séparatistes québécois et le gouvernement fédéral.

J’ai inconsciemment modifié mon langage et développé l’image du vrai terroriste. De fait, je croyais totalement l’un des leurs.  J’étais fier de me considérer felquiste d’âme, même si cela n’avait de réalité que dans ma tête et peut-être dans celle de la police qui me talonnait de plus en plus. Plus j’étais fier de moi, plus j’étais paranoïaque.

Je me suis tellement pris pour un révolutionnaire, que j’en suis venu à prendre tout le monde pour des policiers.  Je n’avais pas l’étoffe d’un terroriste.  Cela devait déprendre de la sorte de pot que je consommais. Une chose est certaine, la musique rendait les voyages très agréables.

Je vivais un vrai calvaire intérieur.  Je prenais conscience que j’étais très insécurisé, fruit de la chicane permanente entre mon éducation et la vraie vie.  Mes valeurs et celles de la société. 

Ça ne paraissait pas, car, j’étais tout autant brave que paranoïaque quand il s’agissait de défendre les intérêts de la région. 

Je croyais dans ma mission.  Je voulais aider aux pauvres de la région à se sortir de la misère.  J’étais prêt à mourir pour améliorer la situation des miens. 


J’étais heureux seulement quand je me sentais en amour.

Ce problème de conscience venait peut-être du fait que durant toute mon enfance, je voulais devenir un saint.   L’amour est le centre de l’enseignement chrétien, le summum de cette religion, et non, l’interdit sexuel, le péché.   

Il y a dans la pédérastie l’amourajoie, une complicité intergénérationnelle qui vaut toutes les éternités de contemplation religieuse.  Être en amour avec l’amour, nous permet de vivre comme sur un nuage, avec l’impression d’être branché directement à Dieu.

Si tout allait mal dans la région, heureusement, mon amourajoie permettait de rétablir l’équilibre.  Mes aventures amoureuses me permettaient de trouver la vie extraordinaire.  Elles me projetaient à l’extérieur de la douleur intérieure et devenait un chemin à suivre pour continuer le combat.  

Un soir près d’une auto accidentée, près de chez moi, un jeune garçon examinait les dommages.  Sa beauté était très grande.  Je l’ai invité chez moi, malgré les dangers. Il s’appelait Gaétan. Il avait 16 ans.

Il prit une bière en me racontant comment il se protégeait des fifis avec l’arme qu’il dissimulait dans sa poche.  Sa beauté m’attirait trop pour ne rien risquer.  Je m’avançai, je le complimentai sur sa beauté et sa jeunesse, et lentement, mais sûrement, j’étendis les doigts sur son pantalon. 

On a pu les garçons de 16 ans qu’on avait.  Non seulement ils sont plus émancipés qu’on l’était, mais ils sont aussi plus développés.  On pourra jamais me faire croire que ça ressemble à de la pédophilie, car non seulement chacun est consentant, mais chacun en jouit.  Il savait ce qu’il voulait et il avait les instruments pour tracer son chemin.

Fort de cet exploit, la chasse fut ouverte avec frénésie.  Chez les amourajeux  comme chez les gais, la chasse ou la cruise est un instant privilégié.   L’excitation de l’incertitude titille autant que le partage concrétisé.   Celui qui te vire le plus l’âme à l’envers.  Le moment, la seconde du « oui mutuel » ou du dur « rejet humiliant ».

L’amourajoie ne m’apparaissait pas comme un défaut. 


Ces jeunes aimaient ces expériences sexuelles et j’aurais été un imbécile de m’en priver, sous prétexte que la majorité n’y comprend rien et l’interdit par ignorance. 

Ces nouvelles aventures et mes poèmes m’ont amené à discuter ouvertement de mon amourajoie. Je ne craignais plus de dire à un petit  » t’es si beau que je te voudrais ».  Dans les Vauxcouleurs conservateurs, c’était plus qu’osé ; mais j’étais heureux de ne plus toujours devoir vivre en hypocrite.  

J’étais convaincu que légalement, ces aventures ne pouvaient pas attirer d’ennui à personne d’autre que moi.  Je m’en étais informé auprès d’avocats qui me l’avaient confirmé.  Ainsi, j’étais certain que jamais on ne pourrait se servir de mes relations amoureuses pour attaquer mes amis.

Dans ma famille, à cette époque, peu était au courant.  Mon père rejetait complètement mes amours et ma mère me dit parfois qu’elle préférerait me voir mort et sauvé que vivant et amourajeux.  Ce n’était pas par méchanceté, c’est ce que l’Église nous apprenait.  C’était le genre d’intolérance que la charité chrétienne prônait à cœur de jour.  Une ineptie du genre : tu dois détester le péché et non le pécheur qui se mélangeait dans la tête des bons catholiques.

Ces principes religieux sont devenus des formes de discrimination de la part de la majorité qui croyait détenir seule la vérité.  C’était normal pour eux le sexe, c’était le péché des péchés. La Cadillac pour se rendre en enfer. Le contraire de ce que nous propose la religion si on y réfléchit.


Parce que j’étais encore un bon petit catholique, les remords de conscience faisaient rapidement surface ; mais mes expériences m’avaient profondément éloigné de la religion catholique.  J’ai toujours eu un petit problème avec l’autorité.

Je doutais de plus en plus de la pertinence de m’interdire de partager une expérience sexuelle avec un autre garçon s’il en manifestait le désir.  Je ne voyais réellement pas en quoi ces plaisirs pouvaient être dangereux ou néfastes pour eux.  Il n’y a rien de souffrant à se faire toucher la queue, même si on nous a appris que c’est pire que la bombe d’Hiroshima.

Pour une fille, ça pouvait être différent, car elles croient plus facilement que tout ce tout ce qui est sexe est mal, honte ou sévices.  Les conséquences sont aussi différentes.  Et, les filles n’ont pas la même émotivité que nous.

Pour moi, la seule chose qui comptait, c’était la vérité.  Pourquoi nous mentait-on sur tout ce qui touche la sexualité ?  Pourquoi en avoir honte ? La sexualité est humaine, personne n’y échappe.

La prison m’avait appris que le christianisme est profondément hypocrite, car il confond ses racines avec la Bible, qui elle repose sur la punition, la condamnation du sexe et l’Évangile.  L’Évangile, au contraire, repose sur la tolérance et l’amour du prochain.  Plus je méditais, plus je percevais la différence entre Dieu et Jésus.  Plus je m’approchais de Jésus, plus je trouvais le Dieu de la Bible fanatique et pervers, car il ne pensait qu’à punir et faire la guerre.  Ce fut d’ailleurs un des points que j’ai développé dans l’Homo-vicièr. 

Les chrétiens ont choisi le chemin de la lutte contre leur nature profonde et leur sexualité.  Ils oublient que dans les Évangiles en aucun moment Jésus ne considère le sexe comme quelque chose de mal.  Il dit même à Marie-Madeleine qu’elle est pardonnée parce qu’elle a su aimer. Jésus condamnait aussi ceux qui jugeaient leurs voisins.  L’amour était le centre de son message et non d’interdire le sexe.  Pour lui, l’amour à l’intérieur du péché éliminait le mal.

 
Le rôle du plaisir dans ses rapports était évident, autant pour lui que pour moi, mais je savais aussi que cela ne pouvait pas durer, tourner en grand amour, ce que je cherchais.  La très grande majorité du temps, je partageais ce plaisir avec des gens que je revoyais que très rarement ou pas du tout.  Le plaisir pour le plaisir. Le plaisir espacé d’une éternité entre chaque aventure.  Mais, ça nourrissait ma mémoire et le désir de recommencer.  Je trouvais plus normal de rechercher le plaisir que le sacrifice.
 
Pour moi, l’amourajoie était la porte d’entrée de l’amour.  Il y avait déjà une différence entre mettre la main sur le pénis par curiosité, par hommage à la beauté, et vivre à ses côtés et l’aimer. 

Bizarrement, le sexe prend moins de place dans les relations quand elles se prolongent.  La tendresse, la complicité, le partage du bonheur, le plaisir d’être ensemble prennent tout l’espace.  Les joies ne se meublent pas seulement par une aventure sexuelle momentanée, mais exige sa répétition à travers l’amitié naissante.

Je commençais à faire de sérieuses différences entre le message du Christ et le fanatisme chrétien des mangeuses de balustrades qui se centrait sur l’unique interdit du sexe.  Une vraie maladie. 

C’était tellement fou qu’on ne pouvait même pas se questionner sur sa propre sexualité sans passer pour un cochon.


Par contre, tu ne peux pas vivre le contraire de ce que tu es, seulement parce qu’une société est assez bornée pour condamner toutes formes de relations sexuelles en dehors du mariage.

Cette année fut assez heureuse.  J’étais politiquement devenu fanatique, mais il me semblait que la police ne s’intéressait plus à nous.  Petit à petit, les choses revenaient au naturel et la poésie reprenait le dessus.


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