Radioactif 563
Radioactif 563
Textes de 2009, p. 1236
26 Novembre 2009
La femme à la maison.
En fait, avoir été accusé m’a forcé en 1974-75, de m’occuper des enfants à la maison pendant que Suzanne allait au CEGEP. Dans la tradition grecque, j’aurais été un moins que rien, car je remplaçais la mère durant la semaine. J’étais seul avec les deux petits (un gars et une fille) et je devais les garder.
Bizarrement, sur semaine quand j’étais seul, les chicanes gars-filles prenaient vite le bord. Plutôt que de prendre pour un ou pour l’autre, les deux devaient s’en aller dans leur chambre respective si la guerre prenait. Je privilégiais la bonne humeur et le plaisir. Les jeux tenaient une place de choix.
J’ai compris à travers cette expérience comment il est faux de prétendre qu’une femme à la maison n’a qu’à « bitcher» au téléphone parce qu’elle n’a rien d’autre à faire. S’occuper de deux enfants, ce n’est pas un cadeau. Tu as du travail à plein temps, si tu veux vraiment être une personne responsable.
Par contre, dès qu’il y avait la mère ou un autre témoin, c’était l’enfer, la guerre des sexes. La fille qui écœure et le gars qui frappe ou vis-versa. Toujours dans un même but : attirer l’attention.
Les enfants sont des manipulateurs extrêmement efficaces. D’ailleurs, la fille a quitté l’école libre, à cause de la violence des gars. Je l’ai ensuite eue comme élève dans un cours d’anglais, à Montréal, au secondaire. Elle a préféré l’éducation conventionnelle.
J’adorais ces jeunes et j’ai compris que le meilleur élément de discipline, ce n’est pas la baguette, mais de trouver quelque chose d’intéressant à faire. Les jeunes adorent la créativité, le jeu, apprendre. Mais, malheur à toi, si tu ne t’en occupes pas.
Mon père ne pouvait absolument pas tolérer les manières de la petite quand je l’ai amenée avec moi. Une visite pour un emploi.
On dirait que les jeunes savent deviner exactement ce qui exaspère les autres. Ainsi, Yanie passa toute la journée avec mes parents. J’avais dû me rendre à l’extérieur pour postuler un emploi. La petite avait été très sage et très gentille. Dès que j’ai mis les pieds dans la maison, c’e fut la crise de la liberté absolue. Le linge a pris le bord et la petite a fait comprendre son point de vue en affirmant, en me voyant arriver, qu’enfin elle pouvait être à nouveau libre. Elle s’est mise à poil. Ce n’était pas quelque chose qu’on faisait quotidiennement ; mais c’est comme si elle avait su qu’en me voyant elle reprenait son pouvoir. Elle savait qu’il ne pouvait rien lui arriver puisque j’étais là.
Elle a dû vite se rhabiller. Mon père ne tolérait pas cette liberté d’expression.
Elle n’avait jamais fait de scène pour se mettre nue à la maison. C’était permis et on ne pensait jamais à ça. Je suis certain que la seule raison pour laquelle elle a agi ainsi c’est qu’elle a compris que c’était défendu, que ça exaspérait mon père. La vengeance parce que je ne l’avais pas amenée avec moi.
Ces deux jours parurent pour mes parents plus longs qu’un séjour en enfer. Je dois avouer que ça me fatiguait aussi. J’étais libre, mais je n’imposais pas ma liberté. Ta liberté cesse là où elle emmerde les autres. Cette vie, c’était un laboratoire. Vivre libre chez toi, ce n’est pas pareil quand tu vas ailleurs. T’as des limites à respecter et si tu n’as pas appris à le faire, c’est nécessairement une situation conflictuelle. J’apprenais à devenir un peu moins l’apôtre de la liberté absolue.
J’aurais bien voulu prétendre que les jeunes n’ont pas besoin d’un certain encadrement, la vie me donnait tort.
En principe, je devrais être d’accord et pourtant je trouve ça totalement exagéré. Il y a une différence entre être nu sur une plage de nudiste ou chez toi et être nu chez des gens à qui on rend visite et qui ont horreur de la nudité. La vie en société est faite de compromis. La liberté finit là où commence celle de l’autre.
Cette expérience d’école libre, mettant l’accent sur le fait que l’adulte ne devait jamais intervenir dans la vie de l’enfant, sauf pour échapper à la violence, me fit prendre conscience que je pouvais aussi vivre facilement avec des gars-tentations sans chercher à obtenir la réalisation de mes fantasmes. Les amis qui venaient chez nous étaient trop jeunes pour m’attirer et le petit chez moi ne voulait rien savoir de la sexualité. Vas donc voir pourquoi.
Autant sa sœur aimait la liberté sexuelle et le l’affirmait, autant lui était scrupuleux. Et- c’était son droit le plus absolu. Sa mère ne l’avait pas élevé différemment que sa sœur. Chaque individu est ce qu’il est. La liberté, c’est apprendre à vivre et laisser vivre.
Le petit gars que j’adorais ne voulait rien savoir. Il avait même peur de moi au début. Il avait peur que je l’encule. Où était-il allé chercher ça? Heureusement, ça ne m’a jamais rien dit. Ça m’écœure même parfois. Par exemple, dès que tu as de la porno, c’est la première chose que l’on met en évidence, comme si les gais étaient tous assoiffés de trous noirs.
Ce n’est qu’avec le temps qu’il apprit à me faire confiance et ainsi oublier le discours qui m’entoure habituellement à savoir que je suis pédéraste.
Je ne sais pas comment il a connu cette aversion et pourquoi il la projetait sur moi puisque pratiquement personne ne sait qu’un pédéraste est gai. Dans la société d’alors, on croyait que tous les gais étaient sodomites. Cela prouve qu’un jeune sait très vite où est le danger en fonction de ses choix et de ce que pense l’environnement. Autant la fille, le soir, se promenait nue dans la maison, autant lui n’aurait jamais enlevé ses bobettes. Ils vivaient pourtant dans la même ambiance sociale.
Je fus un bon disciple de Platon, dans le sens que l’ai respecté ses vœux et ses scrupules. Par contre, j’ai appris que les jeunes peuvent avoir des désirs sexuels et qu’ils trouvent moyen de les exprimer dès qu’ils sont laissés le moindrement libre. Ça ne dépasse pas la curiosité. L’excitation tient plus de l’interdit.
Cette expérience était une preuve de plus que notre approche de la sexualité chez les jeunes est complètement stupide au Québec. Les vieux se projettent dans leurs enfants, oubliant qu’ils ont leur propre échelle de valeurs, souvent même avant les dix ans qui marquent le début de l’adolescence chez le garçon.
26 Novembre 2009
La Thérèsa, traitement
Puisque la Thérèsa Gold mine semble intéresser plus d’une personne, je vais publier en rafale le traitement que j’ai préparé dans le but de créer un film. Le traitement, c’est la phase juste avant de terminer un scénario. Tout y est presque, il suffit de produire les paroles.
Évidemment, l’histoire a été dramatisée. J’ai ajouté des éléments qui ne sont pas historiques. Par contre, je me suis servi de mes connaissances sur le sujet pour donner vie à ce texte et que ce soit le plus près possible de cette réalité. Peut-être un jour un scénariste voudra bien que l’on retouche le traitement pour en faire un scénario et un film. Comme mon père, je crois, que l’histoire de la Thérèsa Gold mines est une extraordinaire histoire d’amitié.
27 Novembre 2009
Pourquoi cette hystérie ?
Je ne sais pas si c’est parce que je ne suis pas vite à comprendre, mais il me semble que l’on devient totalement fou dès qu’il était question de sexe au Québec.
Sommes-nous vraiment sortis de notre grande noirceur ? Est-ce qu’on confond la religion avec la peur du sexe ?
Est-ce qu’il y a quelque chose qui m’échappe ? Pourquoi un vent de folie pour un attouchement sexuel ? Personne n’est blessé. Le jeune aime habituellement ça, s’il y participe volontairement, ça arrive même que c’est lui qui commence, mais comme disent nos moralistes, c’est à toi, l’adulte, de dire non et traverser le désert sentimental. Il avoir un a priori : le sexe est mal dans son essence même.
Pourquoi dire non à un plaisir, si on croit que celui-ci n’a rien à voir avec le mal ? A-t-on le droit de penser autre chose que la majorité ?
Pourquoi dire non ? Pour que le jeune pense que c’est mal. Où est le mal? Qu’est-ce qu’il y a de mal à être nu ou à jouer aux fesses si on est tous d’accord à avoir du plaisir ? Est-ce qu’on a tous fait vœu de chasteté ? Est-ce plutôt que l’on ne nous a jamais appris que l’on est sexué dès notre conception? Que l’interdit est plus contre nature que le réveil à la sexualité. Pourquoi mentir ? Refuser de croire ce que l’on pense pour obéir à des règles qui sont nées de l’ignorance et d’une peur injustifiée ? Le droit de choisir son partenaire, la possibilité de le faire, est une chose qui nous différencie autant de l’animal que notre intelligence.
Je n’ai jamais vu un garçon qui se mettait à boiter parce que je l’avais sucé. Qui s’affaiblissait ou qui se mettait à pleurer parce qu’il s’était fait masturber? D’ailleurs, les jeunes ne sont pas assez fous pour ne pas trouver un moyen d’échapper aux griffes de l’enfer ; s’ils le désirent. Ils n’ont qu’à ouvrir le bec pour que des milliers d’oreilles soient à leur écoute. C’est même plus important que de bien manger pour aller à l’école. Cet interdit leur enlève leur droit fondamental à leur vie privée, mais ils sont chastes. Il faut les garder idiots, mais chastes. Par contre, c’est bien que le jeune puisse compter sur les autres (famille ou école) s’il se sent agressé ou forcé à quoique ce soit, par qui que ce soit qui ne lui convient pas.
S’il a appris qu’il est maître de sa conscience, il saura dire un oui ou un non très clair. Il saura trouver les arguments pour dissuader qui que ce soit. Y compris la menace de la dénonciation. J’y mets un bémol : est-ce que ce serait plus dangereux de rendre l’autre, l’adulte, peureux des conséquences ? Le pire, c’est toujours la possibilité de violence, de viol, de peur et le besoin d’éliminer un témoin. Aie-je raison. ? Là-dessus, la police a une bien meilleure expertise que moi. Je suis persuadé que tu es plus dangereux si tu es un frustré.
Si les parents sont capables d’en parler sans devenir hystériques, le mieux à faire c’est de rencontrer cette personne et de très clairement lui faire comprendre de se tenir loin, si le jeune le désire vraiment. S’il ne le fait pas, alors, la police est là.
Malheureusement, il y en qui ont les poings trop ardents pour pouvoir discuter intelligemment. La peur de la sexualité chez les jeunes me fait penser aux lignes d’attente pour aller se faire vacciner contre un poison mortel alors qu’il n’y a encore rien qui presse. Une forme d’hystérie. Ce n’est pas pour rien qu’il y a autant de jeunes qui se suicident. On ne respecte pas leur personnalité, car on rejette tous ceux qui n’ont pas la même morale sexuelle que la majorité.
Le jeune a aussi le droit à sa sexualité d’autant plus que ça joue un rôle essentiel dans sa perception de lui-même, dans le développement de sa personnalité.
Par contre, les parents capotent, s’ils apprennent que leur jeune a eu le malheur d’essayer de découvrir les petits plaisirs de la chair. Ils s’imaginent que ce petit curieux ne saura jamais devenir un être responsable. C’est déjà un paria. C’est un milliard de fois pire si c’est entre deux garçons. Pourtant, si on ne le dit pas, ça n’a aucune conséquence grave dans l’avenir. Jouer aux fesses ou touche pipi ne te rend pas impuissant.
Un peu plus, et on essaierait de nous faire croire que les plaisirs sexuels conduisent à la drogue. On a déjà un petit bout de chemin de fait en ce sens, en affirmant que l’endroit de la jouissance dans le cerveau est le même pour la drogue, la boisson, la cigarette que le sexe. Attention, si vous voyez un crâne se mettre à palpiter, c’est que votre virginité est en danger, mais habituellement, ça paraît plus dans le regard, le sourire, le déhanchement… le langage non verbal. On sait se reconnaître entre personne qui aime ça. Il n’y a pas d’âge.
Je n’étais pas, non plus, de ceux qui croient que sucer un autre est un acte de cannibalisme. Les curés nous faisaient croire que se masturber, c’était tuer un petit qui aurait pu vivre. Une forme d’avortement. Mais, on oubliait de nous dire que la nature nous vide quand c’est trop plein et que de ne pas le faire serait encore plus dangereux. On appelle ça avoir des «wet dreams».
Comment peut-on respecter les lois quand elles s’appuient sur de telles idioties? Pourtant, dès que tu te faisais prendre, c’était pire qu’un tsunami d’hystérie. À les entendre parler le petit n’en dort plus. Est-ce parce qu’il essaie trop de reproduire son plaisir ou qu’il a peur de la folie qui s’empare soudainement de ses parents, des voisins ? Pour que la police y soit mêlée, ce doit être grave en maudit. Pour que l’on capote à ce point, ce ne peut pas être banal ? Comment le jeune peut-il se sentir en sécurité devant un tel déploiement de haine contre celui avec qui il a osé partager son intimité. Faire un tel chichi, c’est ce qui est complètement débile.
Si tu joues aux fesses quand t’es jeune, t’es le diable en personne, le méchant qui pollue l’univers. Comment peux-tu avouer avoir aimé ça ? Il n’y a personne d’assez fou pour ne pas y voir là un danger pour elle-même.
Si les parents devenaient moins débiles et qu’on essayait de penser au bien véritable du petit, personne ne serait traumatisé pour un attouchement sexuel. On n’en ferait pas un drame, surtout pas digne de la télévision. Il n’a aucune proportion intelligente entre le geste et la réaction. C’est de la folie pure. De l’hystérie.
La religion nous a rendus complètement paranoïaque.
Les Grecs avaient l’intelligence de faire une distinction entre un viol et une relation mutuellement consentie. Ils auraient été comme moi, contre la pédophilie parce que le petit est trop jeune pour ne pas y voir un danger. Il ne comprend pas encore. Un pédophile est d’une certaine manière un « malade » parce qu’il ne pense qu’à lui et ses gestes peuvent traumatiser un jeune enfant (moins de 10 ans), sans que ça ne le dérange. Par contre, il y en a qui sont tellement scrupuleux que le gros bon sens n’a plus sa place. La famille pédophile: les parents qui ne pensent qu’au sexe de leurs enfants et petits-enfants. Donc, qui se mêle de quelque chose qui ne les regarde pas. La pédophilie sans pénétration n’est pas pire qu’une caresse et à ce que je sache personne ne méprise les caresses.
C’est d’ailleurs en ce sens que les grecs avaient créé la pédérastie. Elle ne se confondait pas avec l’homosexualité, car la liaison devait prendre fin avec l’arrivée de la barbe.
La pédérastie est une expérience de jeunesse, de gars, dans le vrai sens du mot. Par contre, c’était bien que dans la mesure où cette relation créait des liens d’amitié à vie. On y donnait parfois une valeur qui n’existe pas nécessairement. Il y a, à cause de l’interdit, bien plus de rencontres fortuites, sans suite, car on a peur de ce que les autres pourraient penser de nous. Les autres pourraient comprendre et on ne veut pas se faire traîner dans la boue.
Je n’étais plus le petit gars coupable de ruiner l’univers parce qu’il ne se traumatise plus en se forçant de croire qu’il y a de quoi de mal ou de mauvais dans la sexualité.
La libération sexuelle faisait autant partie des choses qu’il fallait implanter que tout autre élément économique de la révolution.
Je crois sincèrement que le jour où l’on défendra davantage la violence que le sexe, on aura atteint un degré de liberté intérieur qui ne peut que nous forcer à avoir des institutions plus saines et plus humaines.
C’est pourquoi ce sujet est devenu une lutte qui vise à améliorer la vie. Est-ce que j’ai raison, je le crois, mais je ne détiens pas nécessairement la vérité, je la cherche.
J’ai poursuivi mes démarches auprès de la Commission de la réforme du droit pour essayer de faire comprendre mon point de vue, mais j’ai échoué. C’est encore pire avec notre tournant à droite. Les féminounes confondent leur peur avec leur projection.
Je continuerai avec ses sujets selon le temps à ma disposition. Cependant, je finirai toujours avec le traitement sur la Thérèsa pour ceux que le film intéresse. (Puisque la Thérèsa est déjà dans le CD, je sauterai ces passages.)
28 Novembre 2009
L’hystérie du père.
1974. Je ne peux pas me plaindre de ce qui est alors arrivé. J’avais le choix. J’aurais pu très bien refuser de continuer le jeu, ne pas descendre mon pantalon, mais j’aurais trahi tout ce que je crois de fondamental. Je gardais ce soir-là et je ne vois pas pourquoi j’aurais d’abord refusé de participer à un jeu que les jeunes avaient appris dans un camp. Ils savaient que nous n’avions rien contre la nudité.
Les jeunes avaient été avertis qu’on ne voulait pas les voir tôt, soit jusqu’à ce que l’on décide de s’habiller parce que nous vivions souvent nus le matin. Ce pouvait être onze heures comme une heure. On avait demandé de respecter cette règle, mais les jeunes ont vite senti l’odeur du plaisir défendu. Est-ce qu’on aurait dû les mettre de force à la porte ? Ils ne voulaient pas quitter, c’était leur droit. Ils allaient jouer dans la chambre des enfants, près de la cuisine. Ça nous privait simplement de l’espace qu’on occupait habituellement pour prendre notre café souvent nu.
Quand ce fut mon procès, un des jeunes s’est effondré en larmes, disant au juge qu’il ne savait pas s’il disait ce qui s’était vraiment passé ou si c’était ce que la police leur avait ordonné de dire. Le premier juge s’est récusé. Ce juge a été assez honnête pour reconnaître que dans de telles conditions, il serait impossible de savoir la vérité. J’admire ce juge, car il a agi selon sa conscience et non pour faire plaisir à une institution.
On m’a dit plus tard, qu’un des jeunes avait fait une dépression nerveuse. Ce n’est pas étonnant quand tu vois la folie furieuse qui animait son père. » Je te tuerai, si tu t’en sors. » Plus fou, tu crèves.
Il ne me fera pas croire que son jeune a été plus traumatisé parce que j’avais descendu deux à trois secondes mes pantalons dans le cadre de leur jeu que ses crises d’hystérie. Pauvre jeune ! Il a dû en manger de la merde parce qu’il ne pouvait pas mentir. Y paraît qu’il m’aimait trop pour m’accuser. Je trouve ça écœurant que des adultes se conduisent ainsi envers leurs enfants. Où est le respect ? Qui manipulent les enfants ?
Je me suis arrangé dans ce jeu pour me respecter, tout en ne perdant pas la face. Je l’ai fait, j’ai payé pour et c’est tout. Ce n’est pas ce qui me dérange, même si tu as toujours une peur affreuse de la prison parce que tu ne sais jamais ce qui peut y arriver. La prison, c’est l’anxiété, le problème d’être incapable de faire quoi que ce soit, si quelque chose arrive à l’extérieur.
Ce qui me trouble, c’est l’hypocrisie que l’on exige pour vivre la sexualité, comme eux l’entendent, même si c’est complètement fou, car rien ne justifie l’interdit sexuel, si on vit sa sexualité sans violence et consentie. C’est le droit individuel le plus fondamental avec le respect de la vie privée.
Si on apprenait à dire catégoriquement oui ou non, j’aime ou je n’aime pas, on n’aurait pas besoin d’autant s’énerver sur le comportement des jeunes. Souvent, s’il y a de petits crimes, c’est qu’on crée des crimes qui n’en sont pas, juste pour maintenir ce qui nous apparaît commel’ordre nécessaire. Tout le monde doit penser de la même façon. Comme s’il n’y avait que ces dinosaures de la morale qui ont raison. J’admets que si tu ne respectes pas leurs règles, tu peux t’attendre à être puni, même si tu les crois complètement fous.
La malhonnêteté dans ces procès tient du système judiciaire lui-même. Il y a un avocat payé pour te faire faire mettre en prison et un autre pour l’empêcher. On se fout de la vérité. Tout ce que l’on essaie, c’est de marquer des points.
Dans le procès de Suzanne, la femme avec qui je demeurais alors, c’était très clair. Ce qui me scandalisa, c’était leur procès d’intention. Par exemple, un moment donné on a amené nos enfants jouer dans des machines. Ils voulaient amener leurs petits amis. Pourquoi aurions-nous dit non ? C’était la fiesta pour eux. Pas au procès, selon la Couronne, nous les avions amené pour les amadouer, les attirer dans nos filets. Nous n’avions jamais pensé ainsi. Ces mensonges sont tellement dégueulasses qu’ils sont révoltants. Comment l’avocat peut-il mieux savoir que nous ce que l’on a pensé ?
C’est exactement le principe de la vérité de l’Inquisition. On torturait parce que la souffrance permettait de trouver la vérité. Belle folie ! Qui ne dirait pas n’importe quoi pour ne pas souffrir ? La vérité, ce n’était pas ce qui s’était vraiment passé, mais ce que ce gros cochon de la Couronne pensait. Je dois dire que ça me révolte.
Heureusement, encore une fois, le juge qui s’occupait du procès de la mère des enfants que je gardais, a décidé après quelques mois qu’elle avait été suffisamment punie, à travers ce que j’avais enduré, car nous avions aussi la responsabilité de deux enfants.
Ce juge était correct. Il ne voyait pas qu’un côté de la médaille et savait que si tout continuait dans l’ordre, c’était sûrement parce qu’on avait exagéré la situation. Les parents étaient plus hystériques que les enfants qui ne comprenaient pas tellement tout ce cirque. Ils étaient les prisonniers. On s’en servait pour nous punir de ne pas penser comme eux.
Je n’en veux pas aux jeunes d’en avoir parlé, s’ils avaient eu des parents moins sautés, on n’aurait pas vécu cette merde.
La seule chose qui m’a profondément écœuré. C’est d’avoir des gens qui prétendent savoir mieux que toi ce que tu as pensé. Des trous-de-cul !
Finalement, j’aurais pu devenir complètement paranoïaque à mon tour, quand j’ai appris que la femme avec qui j’avais découvert le plaisir de la vie de couple avait vu les frères Rose, à Percé, mais qu’elle avait aussi une carte du parti libéral. Moi, qui ai déjà de grandes tendances paranos. Cette période fut trop riche en enseignement pour que la politique ait une importance assez grande pour me déstabiliser.
Mais, encore une fois, je ne m’en voulais pas parce que je m’étais battu pour ce que je crois. J’étais un pisseux qui se tenait debout.
Devant la possibilité de la prison, on est tous des pisseux. Ceux qui pensent que la prison, ce n’est rien, parlent à travers leur chapeau.