Radioactif 544
Radioactif 544
Raoul Roy, écrivain.
Un des livres les plus percutants que j’ai lu est : Jésus, guerrier de l’indépendance, de l’auteur (non le chansonnier, mais l’écrivain) Raoul Roy, publié par Parti Pris.
Ce dernier a écrit ce livre à la suite d’une recherche faite en Israël. Selon cette recherche, Jésus était le chef de la branche pacifiste d’un mouvement révolutionnaire armé contre Rome,alors que Barabbas était le chef militaire de l’armée révolutionnaire.
Pendant que Barabbas menait la lutte armée, Jésus s’occupait du plan pacifiste et les nouvelles normes qui devaient régir, après la victoire, la vie des révolutionnaires qui l’appuyaient.
Pas bête dans le fond, car la révolution française fut à mon sens un échec. Même les révolutionnaires sont passés à la guillotine. On a remplacé une bande de bandits par une autre bande de bandits. Pas étonnant que Napoléon Bonaparte soit arrivé par la suite. C’est comme au Québec; on ne va plus à l’église, mais on pense exactement comme au temps des curés.
Le christianisme est une révolution qui a marqué et changé le cours de l’histoire puisque Rome a été vaincu, sans l’être. Les dinosaures meurent tous parce qu’ils sont trop gros. Le christianisme a vaincu, il est même devenu une religion mondiale. Une nourriture indigeste pour Rome. Ces dieux sont morts alors même que les religions étaient les plus grandes banques. La Grèce antique n’a pas disparue parce que les gars étaient homosexuels, mais parce que les dieux ont été avalés par Rome. L’argent était déjà le pouvoir.
Selon Raoul Roy, père spirituel du premier FLQ, ce qui se passait dans le temps de Jésus était similaire à ce qui se passait au Québec. On est occupé par l’empire anglais. Par contre, il croyait que le deuxième FLQ avait été initié par le fédéral.
Une idée que je ne partageais pas. Je n’ai jamais douté de la sincérité des felquistes d’autant plus que j’aurais bien aimé être assez brave pour en être un. C’est encore une de mes contradictions.
Pierre Vallières savait, dès ma première rencontre avec lui, que je suis catégoriquement contre la violence quoique je comprenne que parfois, malheureusement, c’est le seul moyen pour faire avancer les choses.
» Mieux vaut passer pour un petit baveux et aider le monde à évoluer que de rester passif »
La révolution, selon moi, c’est une façon nouvelle de penser la vie.
Aujourd’hui, on semble ignorer complètement l’existence de ce travailleur acharné en faveur d’un Québec indépendant et socialiste. L’histoire est ingrate.
Raoul a travaillé toute sa vie comme recherchiste à Radio-Canada et a créé des revues dont Indépendantiste, dans laquelle j’ai eu la chance de publier.
Raoul, qui n’avait pas de subventions, tout comme moi, s’était acheté une presse et il faisait lui-même la publication de ses écrits. J’ai passé bien des journées à l’aider.
Malheureusement, pour moi, mes livres sont tous vendus alors que certains ont été détruits parce que je n’avais pas assez d’argent pour acheter toutes les copies qui restaient. C’est le cas de Laissez venir à moi les petits gars. Je n’ai jamais eu de droit d’auteur on m’a plutôt donné des copies du livre. Et, comiquement les seuls revenus pour mes livres viennent du fédéral, à cause du programme de la Commission du prêt de droit public qui payeparce qu’on retrouve certains de mes livres dans les universités.
Il eut aussi Réjean qui fut lu aux Ateliers des Inédits, à Radio-Canada.
Je suis très pauvre aujourd’hui parce que j’ai payé pour publier ce que j’écris, le bon vin, les spectacles et les petits gars que j’ai aimés. Il faut bien vivre, même si on veut te tuer. Tuer, dans le sens de t’empêcher de te réaliser. Crever, c’est kaput !
Ce que je ne pouvais pas publier dans des maisons reconnues, je le publiais en photocopies avec une maison d’édition que j’ai créé à cette fin Les éditions du temps.
Chair de poule, un livre de poésie, fut publié par une coopérative étudiante qui n’existe plus j’imagine, et qui s’appelait Les éditions Tic-Tac. Ça ressemblait bien à Pierre Brisson avec qui d’ailleurs j’ai travaillé à la confection d’autres livres parce qu’il était très intelligent. C’était une belle époque, bien avant d’avoir rencontré Raoul Roy.
J’avais gardé des copies de mes livres pour les bibliothèques de Magog (où je suis né) et Coaticook (puisque j’ai été élevé à Barnston qui fait maintenant partie de Coaticook) pour quand je serai mort. Mais, je ne pense pas qu’elles s’y retrouveront un jour puisque j’ai accepté la demande de Jean-Guy St-Roch de démissionner de la Fondation de la bibliothèque de Memphrémagog parce que je suis pédéraste. Je dois être barré. Je suis habitué, c’est rendu quasi quotidien. (Effectivement, la bibliothèque a refusé mes livres, sous prétexte qu’ils ne répondent pas à leur philosophie.)
J’aurai eu de la merde toute ma vie parce qu’on me trouvait politiquement trop radical. Je manifestais seul pour ne pas emmerder personne puisque j’avais déjà été arrêté et je ne voulais pas qu’on se serve de moi pour infiltrer qui ce soi. Je croyais souvent que l’on m’abattrait dans ces manifestions solidaires. J’avais peur, mais je le faisais par devoir.
À cause de ma pédérastie, tout le monde me fuit pour ne pas passer pour un pareil, comme si je ne pouvais pas vivre avec des gens d’une orientation sexuelle différente à la mienne.
Chez Raoul, il y avait aussi un nommé Jérôme Daviault qui nous aidait souvent. Ce fut mon premier correcteur à Parti Pris quand j’ai publié Laissez venir à moi les petits gars.
Celui d’Avant de se retrouver tout nu dans la rue ou le problème du logement était Louis Geoffroy. Il est mort dans un incendie sur le Plateau à Montréal alors que mon texte était encore sur son bureau. On se servit de certaines pages calcinées pour publier les photos.
Lors de notre dernière conversation, Louis Geoffroy disait douter de mes qualités d’écrivain à cause du nombre incalculable de fautes de français que je faisais encore.
« J’avais cru que tu étais un grand écrivain, maintenant, j’en doute. À part du chapitre sur les feux, je ne trouve pas ça très révolutionnaire « , m’a-t-il dit quelques jours avant de mourir. Et, il est mort dans un incendie sur la Plateau, quelle coïncidence!
Raoul Roy, c’était aussi le gars chez qui j’allais emprunter le sofa quand je devais coucher à Montréal. J’ai passé ma vie sans le sou, mais je n’ai jamais manqué de quoique ce soit. L’argent fut toujours un objet de tracas, mais jamais une obsession.
Non seulement Raoul Roy était considéré comme le penseur du premier FLQ, celui qui se battait pour un Québec français, mais il était également socialiste. Un bonhomme extraordinaire, même si je ne partageais pas toutes ses idées.
À son avis, les Anglais du Canada nous avaient tellement tout volé qu’ils s’étaient approprié même notre identité. Selon lui, les Canadiens anglais avaient même prisnotre nom de Canadiens, comme on s’appelait en 1837.
Il était contre le fait que l’on se dise Québécois parce que Québec est une ville et non un pays. Un bien drôle de bonhomme que j’adorais rencontrer parce qu’il m’apprenait toutes sortes de choses.
Un autre point qui nous différenciait : il était certain que la naissance du Parti Québécois signifiait la fin du rêve indépendantiste.
Selon lui, les gens deviendraient inertes parce qu’ils se fieraient sur ceux qui ont nommés représentants, lesquels une fois au pouvoir s’embourgeoiseraient.
Je dois avouer avec le recul qu’il n’avait pas tort. La bourgeoisie est ce qui répugne le plus les gens. Les riches ne pensent pas comme quelqu’un qui doit se battre à tous les jours pour manger. Si on veut gagner notre indépendance, il faut la repenser en vitesse et l’amener à être une préoccupation fondamentale pour tous et non juste des votes de temps en temps.
Raoul Roy voulait aussi que l’on nomme les Cantons de l’est, les Vauxcouleurs, car Cantons de l’est est une traduction d’Eastern Townships.
Selon lui, les Vauxcouleurs est le nom le plus approprié, car notre région est faite de vaux et de couleurs. Ce sont les caractéristiques qui nous sont propres.
Québec et le vrai pouvoir.
Ce n’est pas parce qu’on a un ministre dans un Cabinet que ça veut dire que l’on a un mot à dire dans ce qui se passe au Canada comme le prétendent les vieux partis.
Le cas de Denis Coderre en est un exemple extraordinaire.
Toronto décide tout. Ce n’est pas nouveau. C’était même pire avant puisque la majorité des sièges libéraux (ce qui leur permet d’être majoritaires) sont situés en Ontario.
Le Canada est à Ottawa « a second « Queen Park ». Sauf que le Canada se nourrit des autres provinces et l’Ontario en profite. Le Canada est strictement un prolongement des USA.
Quand j’ai parcouru le pays, j’ai compris que pour l’Ouest, le Canada dirigé par des Québécois existe au profit du Québec.
Quand il parlait de l’Est, il parlait du Québec. Il ne voyait pas que Trudeau et ses trois corbeaux (ce serait une insulte pour les oiseaux que de les appeler moineaux) sont en réalité les pantins de l’économie torontoise.
Les Québécois ont toujours aimé croire qu’ils mènent alors qu’ils ne font que répéter ce que dit le vrai boss, comme dans un prolongement du couple.
Trudeau prenait ce qui se faisait de mieux au Québec et essayait de l’adapter au Canada pour éviter que le pays se divise parce que dans ce temps-là, le Québec avait assez de députés pour devoir en tenir compte.
Il a eu beau amener toutes ces idées, elles furent toutes rejetées : la reine est toujours là, le gouvernement canadien est toujours centralisateur, notre économie est toujours prioritairement ontarienne. La Charte des droits a cédé sur le droit des jeunes à leur sexualité.
La réalité, le Canada est d’abord au service de l’Ontario parce qu’il a plus de sièges que toutes les autres provinces et les gens y sont plus riches. Les partis politiques n’ont aucun autre intérêt que leurs intérêts. Pourquoi le fédéral s’intéresse-t-il particulièrement à sauver l’industrie automobile ? Cette industrie, c’est l’Ontario. L’Ontario, c’est le plus grand nombre de sièges et surtout les grandes fortunes.
Je le savais depuis mon expérience concernant l’aéroport international que l’on voulait à Drummondville. Toronto a pris la décision qu’il serait à Mirabel parce qu’en empruntant des voies aériennes au-dessus de l’Ontario, advenant l’indépendance du Québec, cet aéroport devenait propriété fédérale.
Marchand, Pépin, tous les ministres du cabinet Trudeau ont serré les fesses, penché la tête et baiser le cul de la réalité économique : Toronto is the heart of Canada. Pourtant, les libéraux en chaleur aurait dû ouvrir les yeux. C’était évident.
Rien n’a changé depuis. Un ministre a le pouvoir de son ministère et il se doit aux intérêts de ses électeurs et de son pays. Bien évidemment, si tu es Canadien, tu penses Canada et si tu es souverainiste, tu penses Québec d’abord quoique dans le Canada.
Dans l’avenir, seul ou dans une Confédération, si le Québec est un pays, on pensera Québec. C’est cette ambigüité qui permet à bien des libéraux et conservateurs d’être des Bloquistes, mais elle les tient aveugles en même temps.
Tout le monde sait que l’indépendance ne peut pas se faire sans un résultat positif lors d’un référendum. C’est le seul moyen d’éviter les claques sur la gueule, ce qui n’est pas dans l’intérêt de l’un et de l’autre. Il n’y a qu’un moyen de faire l’indépendance : un référendum ou la révolte.
L’indépendance, c’était le mot chantage : tu nous donnes ceci ou on se sépare. Aujourd’hui, on doit plutôt prouver que c’est mieux d’être indépendant que fédéraste.
L’indépendance ce n’est pas bon que pour les francophones, ce doit être bon pour tous les Québécois. Si on veut faire l’indépendance, il va falloir que le projet transcende les intérêts du Parti Québécois.
Il faut repenser l’indépendance dans cette optique ou imaginer une Confédération véritable, avec un gouvernement décentralisé, où les provinces payent Ottawa pour ses services, restreints à des éléments qui servent tout le Canada. Le reste des pouvoirs appartient aux provinces.
Aujourd’hui, le Canada voudrait bien mettre le Québec dehors, car pour eux, le problème ce sont les séparatistes. Ils ont eu la chienne, même s’ils ne veulent pas que ça paraisse, sauf, que maintenant ils sont de plus en plus nombreux à se dire : « you want to leave, leave».
Le travail doit être de créer ce qu’on veut que soit un Québec indépendant. Le Canada n’acceptera jamais une vraie confédération. Il faut oublier ce projet. Une nation est un mot vide, comme un pays l’est, si on ne le définit pas dans la constitution.
Charest a beau essayé de nous faire croire que le Québec est mieux dans un pays membre du G8, il doit admettre s’il est honnête que si le Canada est en crise, c’est qu’il est complètement dépendant des USA dans une grande mafia mondiale qu’est l’ÉCONOMIE.
Pas de construction, crise forestière ; pas de journaux, crise forestière. Pourtant, l’argent va en Ontario. Après l’amiante, on veut faire la même chose avec l’électricité.
On est en crise parce que notre marché est presque essentiellement américain. Et que dit Jean Charest quand il propose que l’on établisse un marché avec l’Europe : le Canada peut être la porte d’entrée européenne (l’argument clé pour construire l’aéroport international à Drummonville).
Charest oublie que le Canada n’est pas intéressé à l’Europe, le Canada pense comme la Couronne britannique. Il pense capitalisme. Il pense à droite, pense religion.
Le capitalisme, c’est le gros poisson qui mange le petit et qui devient dinosaure. La bibitte qui se mange elle-même, en se bouffant par la queue.