Radioactif 541
Radioactif 541
Textes de 2009, p. 1119
À la retraite, il ne reste que …
Épître premier, selon St-Jean ti-Moineau…
Quand tu ne peux plus travailler, que l’on te refuse comme bénévole, il ne reste plus qu’une chose à faire : se rappeler et s’interroger sur son passé. Pas nécessairement pour te blâmer, mais aussi pour essayer de comprendre comment notre société est devenue aussi folle.
Tu te dis : leur «pardon» qu’il se le fourre dans le cul. De toute façon, ça ne me donnerait rien. Il ne vaut rien. On ne le respecte pas. Je ne pourrai pas plus voyager. Par contre, faut bien faire quelque chose tant qu’on est vivant : on écrit des carnets. C’est moins pire que de voler les plus pauvres comme se spécialisent nos gouvernements.
Il y a un million d’analphabètes au Québec, tu as des diplômes à revendre et on te refuse même comme bénévole plus de dix ans après qu’on t’ait condamné pour un attouchement sexuel. Comment ne pas croire que tu vis dans une société drôlement sautée ? C’est parfaitement débile. Les profs n’ont pas de diplômes, mais au moins on est certain qu’ils sont chastes.
Malheur à celui qui cherche à exprimer sa tendresse, personnellement, ça me force à chanter : « ma bande de malades.» Quel avenir vous offrez-vous ?
Est-ce que je ne suis« pas correct» ou est-ce que je vis dans une société de fous et de paranoïaques ? Tous les malades mentaux croient que les autres sont les uniques responsables de leur sort, c’est le propre de la maladie mentale. Et pire, quand tu l’es, tu ne t’en rends pas compte. C’est le propre des valeurs de la bourgeoisie. Notre société s’énerve pour tout ce qui touche la sexualité parce qu’elle n’a pas l’intelligence de se demander si ces règles sont justifiées. C’est comme ça depuis toujours. Un crime «préjudice» qu’on appelle ça, une règle qu’on ne pense même pas de remettre en cause quoiqu’on apprenne. Il est préférable d’être fou.
L’important, c’est d’être un fou heureux, d’avoir assez de beaux souvenirs pour que la vie soit le film d’une « mémoire agréable ».
Quoiqu’il en soit, personnellement, je crois avoir assez vécu pour livrer mon expérience. Si ça sert à quelqu’un tant mieux, sinon, au moins, ça m’aura permis de perdre mon temps et me faire croire que je suis encore utile à quelqu’un. J’espère aussi ne nuire à personne.
« On vit pour soi. On est seul dans sa peau.» C’est la seule chose que je peux faire puisqu’on m’a mis à l’écart partout. Plus «reject »que ça, tu meurs, mais t’as une vie à finir. L’euthanasie et le suicide ne sont pas encore à la mode.
Pas de ma faute, si le Québec se prend de plus en plus pour le Canada, pire, les États-Unis. La droite avec ses valeurs capitalistes est devenue malade à travers l’histoire. La peur du sexe, mais bénédiction pour les profiteurs. Les assassins sont au pouvoir et dirigent l’économie.
Il faut le voir, mais agir comme si ça n’existait pas. On ne fait plus de religion, mais on est religieux dans le sens le plus négatif du terme : non pas, pour te créer une morale personnelle, un idéal ; mais pour vivre comme l’ont enseigné les curés durant des siècles.
Le matriarcat québécois est une forme de dictature qui ne veut pas partager son pouvoir, d’où ce cri à l’égalité mathématique des femmes. Attention ! L’égalité homme-femme est une valeur extraordinaire. Personne ne peut le contester.
Il y a autant de femmes intelligentes que de cloches chez les hommes. Je n’arrive pas à comprendre que des hétéros paient une femme à un salaire moindre que si c’était un homme qui fait la même tâche. Même un pédéraste ne peut pas comprendre cette idiotie. Peut-être qu’on s’apercevra que pour bien des hommes, les femmes ne sont pas grand-chose : un trou ou une servante. Quand je dis ça, c’est moi qui passe pour le mal embouché.
Plus ça va, plus le Québec est comme les États-Unis, aseptisé et paranoïaque. Une société qui se méprise assez pour créer sa propre disparition.
Montréal est déjà à l’agonie pour ce qui est du fait français. Tout le monde se donne un petit nom anglais pour se faire croire qu’ils valent mieux que le peuple dont ils sont issus. C’est impossible de se mépriser davantage.
Mes écrits ne sont pas des confessions, car je suis content de ce que j’ai vécu. C’est toute une différence. Ça n’empêche pas le Québec d’être une société bourrée de talents incroyables. Un jour, on recommencera à être fier de ce que nous sommes. Le jour où l’économie sera moins importante que la qualité de vie.
Je suis fier de ma vie, mais de moins en moins de mon peuple qui se fait voler 40 milliards à la Caisse de dépôt et qui prend ça en pleurant, plutôt qu’en changeant de gouvernement. Charest est la porte d’entrée pour nourrir les petits copains d’où sa loi sur le déficit, mais on vote pour lui. On a ce qu’on mérite.
Jamais je n’accepterai d’être un bourgeois et encore moins de vivre selon leur morale de malades. Les bourgeois sont des gens qui ont assez peu de « coffre intérieur » qu’ils se doivent d’obéir aux règles des autres, sans se demander si elles ont du bon sens ou non, pour se faire croire qu’ils sont vivants. Ils s’imaginent tellement importants qu’ils jugent les autres à partir de leur propre vide intérieur qui se concentre sur la valeur $$$$. Je me fous de leurs valeurs de têtes enflées. Je n’ai pas un sou. C’est peut-être pourquoi je vis en dehors de ces valeurs.
Puisque je n’ai pas arrêté de me battre jusqu’à ma retraite, ce ne sont pas les commentaires et les examens de conscience qui manquent. J’ai matière à réflexion.
Ce n’est pas parce que je me prends pour un autre. Je crois que j’ai été parfois émotionnellement déséquilibré, fanatique, mais dès je creuse, je pense que tout se justifie assez bien, sauf quelques exceptions comme la boisson, par exemple. J’étais naïf, surtout ignorant.
Comme tout le monde, j’ai fait des erreurs. Au début, par exemple, la liberté était absolue, aujourd’hui, je ne crois pas que la liberté puisse s’appeler ainsi sans la responsabilité.
Je pense aussi que mon besoin d’aider la société à s’améliorer est complètement un rêve d’étudiant ou de jeune jociste (Jeunesse ouvrière catholique). On ne peut pas changer le monde, il est dirigé par des bandits (la vie économique), mais on se doit de vivre heureux, d’être content de sa vie. De ce côté, c’est mission accomplie.
Contrairement à ce que l’on peut croire, je suis très fier d’être pédéraste. Je suis convaincu que ce mode de vie finira par être accepté comme au temps de la Grèce antique. Cependant, elle sera dotée d’un code d’éthique très strict. La protection des jeunes n’est pas qu’une lubie, mais une nécessité. On ne peut pas écarter la pédérastie d’un amour profond. Le jour où notre monde sera assez intelligent pour admettre qu’une pédérastie qui se vit au grand jour est moins dangereuse que la frustration, on aura fait un grand pas dans la compréhension humaine , mais je serai mort depuis longtemps.
La pédérastie fut un moteur extraordinaire dans ma vie, la source de mes plus grandes joies et de mes plus grands malheurs : le suicide de Rouhed, Gabriel qui me battait quand il se droguait et que j’ai dû abandonner , une des seules rares choses que je me reproche dans ma vie.
J’admets que je me suis un peu pris pour un autre du fait que j’ai été abondamment publié, que l’on a suivi mes très nombreuses manifestations. Est-ce que ça valait la peine ?
Aujourd’hui, on ne retrouve aucun de mes textes dans une bibliothèque publique (sauf dans les universités). Mais, quand je mourrai, je me crisserai bien de ce qu’on pensera de moi, conscient de cette haine maladive à mon endroit des gens qui se pensent normaux, mais qui ne peuvent pas penser par eux-mêmes.
Je préfère être un peu fou qu’être aliéné.
Le fait d’avoir été journaliste 15 ans, d’avoir enseigné 15 autres années, d’avoir été ruiné et ostracisé me donne une expérience extraordinaire.
Mais que faire avec ça, quand tu n’as plus d’argent pour publier et que l’on te refuse parce que t’as eu des condamnations à trois reprises pour des niaiseries. Elles servaient, j’en suis convaincu, à essayer de me fermer la gueule.
Même si j’ai toujours été un « numéro spécial », même si j’ai agi parfois comme un vrai fou, j’ai toujours essayé d’aider ceux que j’aimais.
Je suis très content de la vie que j’ai menée. Je crois qu’il est préférable de respecter ce que l’on croit, à avoir les tiroirs bourrés d’argent. L’argent, c’est ce qui permet d’agir, rien d’autre. Je n’en ai pas. Tout ce que je peux faire ce sont des carnets jusqu’à ce que certains imbéciles arrivent à les faire fermer. C’est arriver quelques reprises Je poème, le carnet que je reproduis maintenant ainsi qu’un autre qui affichait les mêmes textes et récemment Centerblog.
C’est peut-être ce qui arrive avec Nipox puisque depuis une semaine je n’ai plus accès à ce carnet, même si on peut encore le lire. J’avais commencé à écrire tous les anciens textes, des années 1970, recorrigés. Une possibilité de moins de pouvoir participer à une société qui est, je crois, avec sa morale, de plus en plus débile.
Mais, il faut bien s’occuper à quelque chose. La vie doit être un plaisir continuel. Donc, je continue d’écrire. Je ne sais rien faire d’autre.
Les deux plus grands cadeaux…
Les deux plus grands cadeaux que la vie m’a donnés sont sans contredit la merveilleuse famille dans laquelle j’ai vécu mon enfance et d’avoir adopté deux petits gars du Bangladesh, Shuhed et Rouhed. Donc, d’avoir pu vivre, à ma façon la paternité, sans avoir eu à endurer une femme. Je suis aussi très heureux d’avoir aidé Gabriel, même si j’ai manqué d’y perdre la vie.
En ce sens, même si Gabriel m’a parfois rendu la vie pénible, après mon procès, je l’inclurais parmi les grâces que la vie m’a données. Je l’ai adoré. C’est le moins qu’on puisse dire.
Mes jeunes furent une dépendance constructive, une école de vie très riche. Ce fut aussi une confirmation que la pédérastie peut être vécue très positivement si elle respecte la volonté du jeune avec qui tu vis. Le consentement et le respect sont les grandes vertus de la pédérastie. Elle est une forme d’amour comme les autres. Dommage qu’on nous force à devoir nous cacher. On a peur de ce que l’on ne connait pas.
Sauf mon ouverture d’esprit vis-à-vis la boisson et la drogue légère, je ne changerais rien, si j’avais à revivre consciemment ma vie.
La boisson a failli tuer tout ce que j’aimais le plus. Quant à la drogue, elle a été une des causes du suicide de Rouhed et a rendu la vie de Shuhed et Petit Gab beaucoup plus difficile.
Malheureusement, ma vie ne sera inscrite que dans mes gênes puisque je n’ai pas d’enfant de mon propre sang. Si la réincarnation est possible, elle risque d’être drôlement longue. Il faudra passer par le cycle de la nourriture terrestre, avant de pouvoir me retrouver dans un spermatozoïde. Dans mon cas, ça risque d’être long en maudit. Heureusement, que l’on n’a pas conscience du temps quand on est mort.
Si j’additionne tout, dans l’ensemble de ma vie je fus un gars très heureux, très privilégié. Je suis satisfait des enseignements que mon existence m’a apportés. Je suis convaincu que les droits de l’homme sont la voie à suivre si on veut créer dans l’avenir une espèce heureuse.
Si on continue d’être « esclave » de l’économie, de cet esprit dinosaure, de gigantisme, nous disparaîtrons de la planète et la nature reprendra ses droits. L’homme est un animal comme les autres. S’il n’apprend pas à mieux respecter la nature, il disparaîtra.»
Quand les religions seront remises à leur place, on apprendra peut-être que l’homosexualité est un moyen naturel pour assurer une sélection naturelle, sans violence. Chez les Grecs, la pédérastie était une forme d’école. Il en fut ainsi dans de nombreuses sociétés, mais on ne veut pas que ça se sache.
Avec le décrochage, on reviendra peut-être à ce type d’éducation qui est basé davantage sur l’émotionnel. Le plus vieux apprend la vie au plus jeune parce qu’ils s’entendent très bien ensemble. C’est une réalité qui n’existe plus dans notre culture depuis des siècles. C’est donc impossible de le comprendre sans qu’on revienne au fond du sujet. Qu’on ait l’ouverture d’esprit nécessaire pour revoir pourquoi ça ne pourrait pas être vécu aujourd’hui. Serait-ce avantageux de retrouver cet état d’esprit ?
La pédérastie ne sera possible que le jour où l’homosexualité sera valorisée. On a encore du chemin à faire avant de comprendre qu’une femme est plus près d’une femme et un homme d’un homme. On vit depuis trop longtemps la famille nucléaire pour songer à la remettre en question. Pourtant, l’espèce n’est plus menacée de ne pas être assez nombreuse, au contraire, elle est devenue trop nombreuse. Elle exige un territoire et une consommation qui entraîne la disparition d’autres espèces.
Même si l’idiotie de la morale sexuelle québécoise fut parfois la raison de ma déroute quand j’étais plus jeune, à l’époque où je croyais ce qu’on me racontait, je dois dire que j’ai eu une enfance heureuse, car avant de penser que mon comportement n’était pas comme celui des autres, je trouvais un plaisir fou dans mes découvertes et mes grandes extases devant la beauté. J’ai été construit par ma pédérastie.
Je dois avouer qu’à cette époque, ma foi m’a beaucoup apporté comme plaisir intérieur, voire spirituel. La vie m’a appris d’abord que chaque individu mérite le respect, que chacun est une expérience unique des forces que la nature a soudé en un être et que notre avenir n’est que le prolongement de notre passé et notre présent. Notre ADN peut se renouveler dans un avenir plus ou moins grand. C’est la seule résurrection possible.
La vie est une leçon, une expérience, une contemplation.
J’aimerais revenir dans 1,000 ans pour voir ce que nous aurons construit maintenant. Est-ce que les hommes auront appris de l’expérience de ceux qui les ont précédés ? Est-ce que les grandes réflexions de nos philosophes auront donné quelque chose ? Qui aura pris le contrôle : la connaissance, la recherche du bien de tous les hommes ou la poursuite effrénée de notre économie? Qu’est-ce qui remplacera les religions puisque nous sommes maintenant capables de constater comment elles nous ont menti ?
Je ne crois pas qu’elles disparaîtront sur le plan strictement spirituel, car il y a une partie de leur enseignement qui peut nous aider à façonner un environnement qui soit intéressant à vivre. La charité, l’honnêteté sont des valeurs morales valables, indispensables au bonheur.
Les humains ne peuvent pas vivre sans une forme de poésie, sans un idéal, s’ils veulent être heureux. Qu’inventeront-ils, en dehors de la technique, pour continuer à progresser ?
En fait, je me demande même parfois si les malheurs de mon enfance ne sont pas tout simplement pas quelques minutes de mon enfance et mon adolescence, de courts moments qui m’ont marqué plus que d’autres. Aie-je vraiment été malheureux ? Est-ce que j’aurais pu être heureux sans avoir connu ces malheurs ? Je me voulais peut-être un «moi» trop parfait ?
Le plus merveilleux est aussi que je fus témoin de quelques réponses qui ont été à la source des réflexions humaines depuis des millénaires. Nous ne sommes pas le centre de l’univers. Nous sommes même de toutes petites bibittes.
La vie est une suite de transformations, un jeu entre les forces électromagnétiques, nucléaires et chimiques. Sommes-nous autre chose qu’un rêve ? Nos émotions sont produites par nos hormones. En est-il de même de nos sentiments ? Le bien et le mal existent-ils vraiment ou est-ce une construction janséniste ?
Les jeunes sont chanceux d’entreprendre le voyage là où nous le terminons. Ils auront des réponses à des questions qu’on se pose maintenant. Seront-ils les premiers à être en contact avec des extra-terrestres ? Est-ce qu’un être produit à partir d’autres éléments de base que nous peut aussi être vivant, intelligent ?
La connaissance est le plus grand réservoir de bonheur parce qu’on la sait sans limite.
Je pense que mon dernier livre lu, écrit par Hubert Reeves, un des plus grands cerveaux du Québec, commence à m’entrer dedans.
Que c’est merveilleux d’exister. De faire partie de ce hasard intelligent. Quand serons-nous capables d’accepter qu’il n’y a pas de naissance sans mort ?