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Radioactif 454

août 3, 2022

Radioactif 454

Texte de 208, p. 823

La naïveté québécoise.

Je ne dois pas avoir été le seul assez niaiseux à croire ce que les curés (les féminounes aujourd’hui) nous disaient, concernant la sexualité.  Ils ont beau crier que ça fait mal, que ça peut nous traumatiser à vie, mais l’expérience quotidienne prouve le contraire.  Comment peuvent-ils mentir autant et obtenir qu’on les croit ?  Notre ignorance est exploitée à fond ainsi que la peur.             
 
Je voulais aller au ciel.  À l’époque, c’était la foi ; aujourd’hui, ce sont les statistiques qui jouent le rôle de la vérité absolue, non contestable.  Tu dois croire en imbécile, c’est-à-dire sans remettre quoique ce soit en question.  La foi aveugle, c’est le paroxysme de l’idiotie ; mais la condition essentielle pour que l’on croit les religions, surtout qu’elles sont toutes devenues des institutions commerciales extrêmement riches.             

Comment peut-il sortir du bien d’institutions aussi perverses ?  Le seul point sur lequel elles s’accordent : le mépris de la sexualité.  Maintenir ce mépris, c’est attaquer l’estime de soi individuelle et te rappeler quotidiennement que t’as, toi aussi, des choses à te faire pardonner.  Donc, il faut faire des sacrifices ou donner de bons montants d’argent pour acheter la miséricorde divine. 

Luther a déjà créé une nouvelle religion pour ces raisons.  Les protestants, c’étaient les scrupuleux du temps ; mais au lieu de se préoccuper de cul, ils songeaient aux indulgences et à la fortune que ça représentait.                  

Comme bien des adolescents, je vivais cette contradiction très profonde : j’adorais tout ce qui était sexe ; mais je mourais de peur, de honte, de mépris de moi, dès que je les occasions se présentaient et que je m’arrêtais à y penser, après une chute.  J’aurais dû au contraire, apprécier l’extrême bonheur de succomber à la tentation. 
    
Pourtant, déjà à cette époque, les occasions réelles de pécher étaient très restreintes, mais une aventure parvenait à me nourrir comme si j’avais été sur le party perpétuel.  Je vivais une sexualité nommée fantasmes et désirs. 

D’autre part, je croyais que les adultes ne pouvaient pas nous mentir, donc, je les croyais aveuglément. 

À chaque fois que je péchais, j’en avais pour des mois à me repentir.  Une façon bien masochiste de faire durer le plaisir.  Je voulais être un saint, mais en bénéficiant de tous les plaisirs de l’enfer.      

Que d’efforts j’ai faits pour échapper à ma petite nature.  On dirait aujourd’hui, que j’aurais dû en avoir les doigts croches.  Des prières à n’en plus finir, mettre des pois dans mes chaussures pour souffrir et ainsi me faire pardonner de Dieu ; des chapelets les bras en croix pour changer et devenir le petit curé ou le petit saint que je voulais devenir.  Mon idéal n’avait pas de limite, mais la force de la beauté des petites frimousses étaient encore bien plus grandes.           

J’avais beau évoquer Ste-Thérèse ou la Vierge Marie, rien à faire, dès qu’une belle petite gueule se présentait, elle devenait un champ d’exploration obligatoire.  Mon «surmoi» ne rejoignait pas la cheville du plaisir que le « ça » me procurait.  Je ne faisais rien de mal, je regardais des portraits de jeunes et je m’excitais de les voir si beaux.  Je rêvais de devenir ami de chacun des pays du globe et parfois de les déculotter pour mieux connaître toutes les cultures et leurs attraits distinctifs. En fait, j’étais sûrement pédéraste, sans le savoir encore. 

Ou j’étais tellement narcissiste que mon amour de moi à travers la beauté des autres (une projection par procuration) me rendait fou de joie et de désirs.  Je ne le ressentais pas ainsi, je ne recherchais pas ma beauté, j’aimais vraiment celle des autres, mais c’est une réalité possible, selon mon idole, M. Freud.             

La sincérité est aussi difficile à obtenir que son premier million.  Au-delà du sexe, je cherchais l’amitié.  Aimé et être aimé voulait dire quelque chose.  Vouloir devenir quelqu’un c’était une obsession.  Je voulais aussi être un père. Je sentais la vocation.  Même si j’avais peur de ma réalité, il me semblait que la paternité serait plus forte que les tentations, ce que l’avenir m’a confirmé avec Rouhed. 

Heureusement, Dieu n’était pas trop difficile, en ce sens, qu’avec la confession, je pouvais m’en sortir facilement.  Je pouvais me masturber le soir, le lendemain, puisque je servais la messe, je pouvais avant de commencer la cérémonie me confesser et ainsi communier.  Quoi de mieux : la jouissance et le pardon automatique. 

Pour être certain d’être sauvé, j’ai fait les sept premiers vendredis du mois qui garantissaient un salut automatique et indiscutable.  Pour ne pas prendre de chance, j’ai rédigé un texte selon lequel je donnais irrévocablement mon âme à Dieu, je me suis coupé et j’ai signé avec mon sang.  Avec une telle certitude, la voie de la passion restait ouverte, il suffisait que j’aie le temps de me faire pardonner.  Pourquoi ne pas se masturber, en disant son acte de contrition?  Il suffit de venir avant de mourir.          

À part, quelques cas particuliers de jeunes qui aiment la jouissance autant que moi donc, facile à offrir et obtenir, j’étais platonique.  J’agissais plus dans mes rêves que dans la réalité.  Et que de plaisir dans les rêves !       

Je suis tombé en amour avec Raymond et le vieux curé sans qu’il n’y ait le moindre attouchement, même pas une tentative.  Pour moi, l’amitié était beaucoup plus importante que le sexe.  C’est d’ailleurs, ce qui a expliqué le besoin d’avertir tout le monde proche de moi de ma pédérastie.  Je ne voulais pas être un danger pour qui que ce soit.  Ainsi, je ne pouvais pas prendre personne par surprise.  Tout était vite très clair.  Je savais vite provoquer la réponse.   

En fait, j’ai très jeune commencé à me révolter contre les mensonges de l’Église quoique je demeurais très profondément croyant ; mais ma croyance était mon interprétation personnelle des Évangiles.  La religion était devenue l’autorité.  Et, je me suis mis à détester l’autorité. 

Comme presque tout le monde, j’avais raison et le reste de l’humanité avait tort.  Je vivais un peu comme un petit voyou à la recherche de l’âme sœur.   Gars ou fille, ce n’était pas important dès que je me sentais compris et apprécié.  Puis, la prison fut un retour à la culpabilité.  Le retour aux sacrifices et indirectement le goût du suicide parce que je ne m’acceptais pas comme j’étais. 

D’avoir toujours été un peu lâche m’a sauvé la vie.  Je ne suis jamais passé à l’acte.  Puis, même en prison, j’ai trouvé un jeune qui m’a plu au point de vouloir me prendre encore pour un missionnaire.  Jeannot me hantait autant que la sainteté. J’ai dû en dire des prières pour chasser le monde de la tentation.      

Cette période, qui m’a valu de me faire dire que j’étais un saint, est quant à moi tout simplement une phase de folie.  Je priais, je jeûnais, je faisais tout ce qui était possible pour me punir d’être un pécheur.  Je croyais à nouveau au miracle jusqu’à ressentir des visions.  Je percevais des petits nuages d’énergies : vision de l’après-mort.  Tout était clair : nous n’étions qu’énergies et la prière était une forme de transmission d’énergies.  Je croyais à nouveau aussi stupidement qu’avant, dans les bienfaits des sacrifices pour s’approcher de Dieu.    

À ma sortie, de prison, j’avais fondé les Disciples de la croix.  Je prêchais l’amour et la pénitence.  Ce fut la période où j’ai été le plus fou. 

Cependant, je ne parlais pas de sexe, je parlais que d’amour.  Je niais l’existence de ce qu’il y a de plus profond et invariable en nous : notre petite nature, ma pédérastie. 

Sauf, que cet amour était probablement plus sincère que mes regrets.  Pour compenser ma laideur intérieure, ces remords m’ont conduit à vouloir changer à nouveau et devenir un militant du bien-être du Québec. 

Je suis retourné m’instruire pour mieux servir mon pays.  Ma petite nature l’a encore emporté.  Et, j’en suis bien content.  
           

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