Radioactif 433
Radioactif 433
Texte de 2008, p. 761
La censure des livres.
On prétend que la liberté d’expression existe au Canada. Pourtant, ce n’est qu’une illusion.
Au Canada, le moyen de censurer les auteurs, c’est de rendre leurs écrits inaccessibles, de les éliminer de toutes les sources d’information, devenir un auteur ni vu, ni connu et si possible de le faire crever de faim. Une version canadienne de 1984.
C’est exactement ce qui m’arrive. Il est quasi impossible de retrouver mes écrits et, là où ils sont, les responsables essaient par tous les moyens de dissuader ceux qui voudraient en avoir accès, de les oublier. La raison est toute simple : j’ose parler avantageusement d’un sujet tabou : la pédérastie.
Les connes confondent pédérastie et pédophilie, mais elles sont au pouvoir.
C’est pour cette raison que l’Association des auteures des Cantons de l’Est m’a rejeté après avoir publié de mes textes dans son journal officiel. On disait que comme grand-mère, il fallait protéger sa progéniture, à la suite d’un texte de Richard Martineau, dans le Journal de Montréal. J’étais membre et l’on m’a fait disparaître.
Ce rejet est possible parce que j’ai deux titres de livres publiés entre 1970 et 1985 qui proclament ma pédérastie : Laissez venir à moi les petits gars et Aimer les petits gars, féerie du monde adulte. Avec ces publications, j’ai été accepté par l’Union des écrivains du Québec, l’UNEQ, comme écrivain titulaire. Non seulement j’ai été membre, mais en 1997, alors que tout avait été bien longtemps auparavant publié, je me suis même présenté à la direction de ce mouvement et j’ai été battu, en élections, par un autre écrivain.
C’est invraisemblable qu’aujourd’hui, ces associations puissent décider que je n’existe plus dans la littérature québécoise. Je voyais mon métier d’écrivain comme une vocation. Je me battais pour le Québec et sa liberté.
Je ne me crois pas particulièrement talentueux, mais c’était important d’exiger d’un nouveau pays, la liberté d’expression, car, c’est le fondement même de la démocratie.
Aujourd’hui, quand j’entends ceux qui nous dirigent vanter la démocratie au Canada, au droit à la liberté d’expression, je peux dire qu’il s’agit plutôt de démocrassie. Ce sont des menteurs et des hypocrites.
Par contre, je ne crois pas que ce soit bien important pour moi que de laisser une trace dans l’évolution du Québec. Mes écrits eurent l’influence qu’ils devaient avoir au moment où je les ai écrits, même si les moumounes d’aujourd’hui, ont réussi à ce qu’on cache tout ce que j’ai écrit.
On reçoit du fédéral une ristourne annuelle pour ses écrits. Il y a environ trois ans, je recevais un peu plus de 1,000 $. Or, depuis cette somme a fondu à environ 300$; mais la meilleure, c’est qu’on ne paye plus pour Laissez venir à moi les petits gars. C’est pourtant le plus connu. On ne le dit pas, mais le fédéral a déjà commencé la censure des écrits, en refusant de payer pour leur publication, comme lui permet la loi C-10.
Dans quelques années, le Québec ne sera plus maître de sa culture. Un peuple, une nation de plus à disparaître.
Ceux qui croit que l’indépendance du Québec, c’est pour demain, rêvent en couleurs.
Je n’ai pas l’intention de perdre mon temps en me présentant à la cour contre l’ACCCE. Je trouverai bien le moyen pour que ça se sache, malgré le silence des médias. .Après tout, avec ce que je gagne, pour continuer à exister dans l’arène littéraire, ça ne paye même pas mes dépenses.
Je voulais, quoiqu’il arrive, dénoncer toute l’hypocrisie, tous les mensonges qui entourent la pédérastie. Particulièrement, la malhonnêteté intellectuelle qui élimine la différence fondamentale entre la pédérastie et la pédophilie. Celle qui nie l’existence d’une sexualité, une libido chez les jeunes.
À cette époque, disons que j’étais un pédéraste égoïste. Je voyais le problème à partir de ce que je vivais. Je me battais pour le droit de jouir de mon corps, d’en être maître, même si c’était le contraire de ce que le système nous prêchait. On était tellement scrupuleux qu’on n’osait même pas penser, parler, encore moins toucher. La sexualité n’avait qu’un but : procréer. Tout était péché en dehors du mariage : une vraie démence.
On avait mis sur pied un système de censure, sous prétexte de protéger les jeunes. Ce système existe encore aujourd’hui quoiqu’on prétende l’avoir aboli.
Me battre pour cette liberté, c’était presqu’une vocation, car je croyais que « cette vieille morale » nous empêchait d’être heureux .qu’elle nous mentait. Je croyais me battre pour le droit au bonheur. Je croyais, et je crois encore, que le Québec doit évoluer et se libérer de l’enseignement sexuel par le vide qu’on nous a imposé avant de retrouver l’estime de soi.
Ma philosophie cadrait parfaitement avec le discours des féministes d’alors, qui voulait que tout individu est le seul maître de son corps et de son esprit.
Aujourd’hui, je mettrais certains bémols, à mon enthousiasme d’antan, d’abord à cause de mon expérience de la vie. Plus de dix ans sans rapport sexuel, ça éteint un peu la flamme. Tu te demandes si quelques minutes de plaisir justifient des années de malheur. Une vingtaine d’années, plusieurs mois de prison plus tard, et surtout, une vie très active ; ça m’a permis d’être encore plus conscient jusqu’à quel point le système nous ment quant à la pédérastie.
On a depuis quelques années crée une véritable industrie du chantage. Le chantage autour de la pédophilie est devenu un moyen de se faire de l’argent facilement. Il est aussi un moyen politique que l’on utilise pour détruire la religion qui fait ombrage à une autre, le scandale des prêtres catholiques. On confond spiritualité et règles morales.
Je constate un retour en force de la morale castré, mensongère, hypocrite, des religions.
Elle nous arrive par la porte de derrière, grâce au discours des féministes réactionnaires sur l’hypersexualisation (quoique c’est en partie un vrai problème). Ces féminounes, à mon avis, sont un petit groupe politique qui sert le fédéral, en divisant la société entre hommes et femmes. Il n’y a aucune différence sur les raisons de fonds invoquées contre la pédérastie et le port du voile : la pureté confondue avec la chasteté. .. La guerre du bien et du mal.
À cette époque (1978), on se servait de l’homosexualité pour créer une chasse aux sorcières contre tous ceux qui ne partageaient pas le dogme fédéraste. Si tu n’obéis pas aux règles de la sexualité, tu es déjà hors-norme et potentiellement dangereux pour ceux qui dominent, en l’occurrence le Canada.
Pour moi, à cette époque, l’indépendance du Québec, c’était la priorité des priorités. J’ai la conviction qu’elle se réalisera avec le temps et la prise de conscience de la population du Québec. Quand les Québécois auront la conviction que l’indépendance améliorera leur sort. Plus cette réflexion sera profonde, plus elle sera inéluctable. Plus le Québec sera français, plus il sera homogène.
Aujourd’hui, mon approche est autre. Je ne préconise pas un plaisir que je veux m’offrir ; je réfléchis sur la philosophie, le droit des individus à leur sexualité et comment une morale, une nouvelle éthique , peut en découler sans brimer la vie privée. Ma réflexion est plus universelle, mais pas moins québécoise.
Au début j’écrivais pour empêcher un prédateur de tuer sa victime parce qu’il a peur de la dénonciation et de l’opinion publique qui manifeste parfois en une vraie hystérie de la majorité. Maintenant, j’appuie sur le fait que la sexualité est génétique et que le droit à l’orientation sexuelle est aussi garantie dans la Charte des droits de la personne que ‘on a modifié par la Charte des droits canadienne.
J’ai surtout écrit fin des années 1960 jusqu’à 1980, car je me croyais capable de devenir un jour un grand écrivain. Aujourd’hui, quand je me compare, je doute fortement de ce potentiel.
À cette époque, je me prenais aussi pour un grand révolutionnaire, j’avais parfois des intuitions paranoïaques qui offraient à la vie un petit côté électrique. La vie était une libération.
Avoir enseigné15 ans, avoir adopté deux garçons m’ont forcé à réfléchir encore plus profondément sur l’importance de la liberté sexuelle, et surtout, j’ai découvert avec le temps, l’importance de la responsabilité. Jouer aux fesses n’est pas un geste anodin en soi parce qu’il implique toute une gamme d’émotions, une vie affective ; mais on exagère sciemment son importance pour en augmenter la valeur commerciale. Les scandales entourant la sexualité sont très payants pour les médias.
Si on veut vraiment créer un pays démocratique, fondamentalement ouvert sur l’avenir, il faut avoir le courage et la détermination d’aller au fonds de la question.
Pour ma part, les règles sur la vie sexuelle, principalement celles qu’on nous imprègne dans l’enfance et l’adolescence (la religion plutôt que la psychanalyse) sont un viol de conscience qui créent l’aliénation. Être aliéné, ce n’est pas seulement être enchaîné, mais c’est aussi aimer ces chaînes. Être colonisé, c’est une chose ; être aliéné, c’est se prétendre heureux dans ce colonialisme.
L’aliénation est le contraire de l’autonomie, de la création d’une conscience personnelle.
Et, c’est pourquoi, il y deux ou trois ans, après être passé à un doigt de la mort, j’ai recommencé à écrire de nouveau sur la pédérastie avec mon livre La pédérastie mise à nue. À ce moment-là, ma question fondamentale était : si je mourrais qu’est-ce que j’aimerais que l’on retienne de mon engagement en faveur d’un Québec libre ? Qu’est-ce qui pourrait aider à l’avènement d’un Québec libre ?
Je n’ai aucun indice me permettant de croire qu’on attache la moindre importance à ce que je pense politiquement. Cependant, je crois que jamais les Québécois ne décideront de créer un pays tant qu’ils ne seront pas non seulement conscients du colonialisme fédéraste, mais de tout ce que peut nous apporter l’indépendance. Ce besoin, cette volonté d’être ce que nous sommes ne peut pas s’épanouir si on continue de s’auto-mépriser.
J’ai décidé de reprendre la plume pour essayer de faire comprendre le cheminement inconscient de notre peuple vers sa libération.
J’ai identifié ce besoin strictement fondamental de faire la nuance entre la spiritualité et les religions pour pouvoir créer une société foncièrement libre et tolérante. J’ai pris conscience que les religions sont des créateurs d’intolérance et de discrimination envers tous ceux qui ne partagent pas exactement leurs convictions.
Que je le veuille ou non, mon amour de l’humanité est essentiellement en lien direct avec mon expérience pédéraste, même si aujourd’hui, je devrais pour être honnête avec moi-même, me demander si je suis encore pédéraste. Je regarde des sites pornos. Je ne vis plus de vie sexuelle avec quelqu’un d’autre, et je suis même rendu comme les curés à trouver que ce besoin est contraignant, négatif parce qu’il m’éloigne d’une réflexion encore plus profonde et m’empêche d’écrire. Il y a tellement d’autres sujets.
Je me ramasse dans une autre controverse. Je suis banni de toutes les associations d’écrivains qui en même temps pondent de grands textes sur le droit à l’expression. Cependant, cette fois l’arme que l’on utilise, c’est de me dénoncer comme pédophile alors que je dénonce moi-même la pédophilie, en s’appuyant sur un de mes romans Laissez venir à moi les petits gars et le texte de l’Aurore.
Cette dénonciation permet de s’assurer qu’aucun éditeur n’aura le courage de publier ce que j’écris maintenant, qu’on essaiera d’effacer la petite gloire que je bénéficiais avant, grâce à mon engagement politique.
Que je le veuille ou non, mon approche de la question est toute autre qu’à l’époque de ce texte.
Aujourd’hui, je me rends compte que les règles de protection qu’on impose sous prétexte que les jeunes sont trop niais pour décider, sont en fait, un moyen de s’assurer que tout le monde est dans le même troupeau de moutons.
Refuser de discuter de ce sujet, de voir objectivement le problème, c’est nier aux jeunes le droit de se créer une conscience personnelle et d’avoir une vie privée bien à eux. C’est refuser la véritable démocratie.
Pendant que des jeunes se suicident parce qu’ils se découvrent gais, le gouvernement continue de subventionner les mouvements qui créent une paranoïa maladive autour de la sexualité, en invitant les jeunes à dénoncer.
On enlève les cours dans les écoles sous prétexte que l’éducation sexuelle appartient aux parents alors que ceux-ci font une crise d’hystérie dès qu’ils entendent que les adolescents (es) ont une libido comme tous les êtres humains. Comme, quand j’étais jeune, la sexualité est redevenue tabou.
On se fiche bien que les jeunes soient noyés dans la violence, on prétend que ça ne les influence pas ; mais on lit tous les livres qu’on leur offre pour s’assurer qu’il n’y ait pas d’allusions à la sexualité. Une telle castration n’a plus sa raison d’exister aujourd’hui dans un Québec moderne.
Le scrupule maladif duquel nous sommes sortis nous marque encore trop profondément pour discuter librement et objectivement du sujet. Pourquoi l’Homme est-il sexué? Les jeunes ont-ils une sexualité? Les règles qui en découlent sont-elles justifiables? En fait, on ne mentionne jamais que dans ma conception toute forme de violence est bannie. Le consentement est le centre de toute ma réflexion.
Même si cela représente un certain danger — j’ai même découvert un blog sur lequel on affiche ma photo pour me dénoncer. J’ai décidé de reprendre ce sujet, là où je l’ai laissé, il y a près de 30 ans déjà, et de dire ce que mon expérience m’a appris. Je n’invite personne à être pédéraste : je sais que c’est une vie de souffrance pour presque tous ceux qui le sont. Même si je suis heureux, je suis conscient d’être une exception. J’ai aussi compris, je crois, le lien fondamental entre la liberté sexuelle et la démocratie.
Que cette haine à mon endroit existe, ça me chagrine ; mais ça ne me surprend pas. Les obscurantistes ont encore le pouvoir et l’argent pour propager la peur. Je suis très chanceux d’être au Québec, car dans certains autres pays, je me ferais tuer juste pour avoir osé aborder le sujet.
Donc, voici ce texte qui fait tant rougir l’Association des auteurs des Cantons de l’Est. À remarquer que j’ai été reconnu écrivain titulaire alors que ce texte et mon roman avaient déjà été publiés.