Radioactif 323
Radioactif 323
Textes de 2008
Une courroie.
En fait, c’est vrai que je n’étais pas une personne importante et je ne le serai jamais ; mais je déplaçais beaucoup d’air avec mes articles. Je semais du vent et j’ai récolté la tempête : on essaie maintenant de s’assurer que je sois bien relégué aux oubliettes, comme une vieille chose afin que ne se propage pas cet esprit de liberté ou d’ouragan.
Tout ce que je faisais, j’alignais mes entrevues pour élargir les champs de conscience. J’ai réalisé l’esprit et l’écrit d’un premier projet de développement de l’Estrie, le projet des 200 millions et j’ai essayé de concrétiser cet élan, en me servant de mon emploi de journaliste.
Pour les entrevues, je trouvais la personne qui disait ce que je voulais entendre dire. Mes entrevues avaient un but : aider les plus pauvres à mieux s’en tirer, ce qui est devenu pour moi synonyme d’indépendance du Québec.
Je n’étais pas plus fin que les autres, mais j’essayais de comprendre et d’agir.
À cette époque, contestation et révolution avaient un tout autre sens qu’un éclat de rire. Quand j’ai laissé le journalisme, j’ai éliminé tout mon pouvoir d’éducation et d’action. En continuant d’écrire, je suis encore un tantinet fatigant, car j’essaie de réfléchir et ça remet encore des choses en question.
En 1996, on a cru que je prenais définitivement ma retraite. En étant accusé et reconnu coupable d’avoir touché le zizi d’un petit compagnon de voyage, je perdais toute crédibilité. Il suffit de le rappeler pour que je sois un moins que rien.
Pourtant, le juge avait dit : « il n’est pas un danger pour les garçons, mais il en est un pour les institutions du pays. » Même l’enquête policière n’a pas pu relever une ombre d’infraction après avoir interrogé les garçons de l’école où je travaillais.
Le système est une organisation de bandits légaux et non légaux mille fois plus forts que moi. Je suis devenu pour le système qu’une simple flatulence.
Poésie de jet.
Oraison pour des salauds dans Chair de poule, aux éditions Tic-tac, marque l’évolution non seulement des thèmes abordés dans mes poèmes, mais un changement de structures qui se personnifie à l’intérieur même de la calligraphie des textes. Les césures sont plus claires. Ce changement notable est dû à la fréquentation des poètes, grâce aux nombreuses relations de mon ami Gaétan Dostie.
Entendre, voir, fréquenter les plus grands poètes du Québec a modifié mon écriture d’autant plus que, dans le temps, l’enseignement de la poésie à l’école n’existait pas. Il est venu avec les cégeps. En fait, comme le reste, je l’apprenais sur le tas.
Aujourd’hui, à force d’être refusé, je n’écris presque plus de poésie quoique j’adore encore en lire. La poésie demeure pour moi l’expression profonde des sentiments et puisque je vivais une période très politisée, il était bien normal que la politique s’insère dans ma poésie.
Pour combattre, les indépendantistes, ce qui rimait avec artistes de tous les genres, on a commencé à dire que la poésie ne pouvait pas avoir un contenu politique. Puis, pour protéger les jeunes de leur réalité, on a fait de même avec la pédérastie.
Tu peux tout dire en autant que tes images de nature sexuelle soient hétéros ou gaies et que ta façon de vivre ta sexualité s’exprime dans les mêmes formes, gestes et expression que le veut les adultes. La pédérastie est délinquante. On semble ne pas se rendre compte que l’interdire c’est toujours de la censure, donc un emprisonnement de l’esprit.
À force de vouloir rendre la poésie impuissante et épurée, elle finit par ne rien signifier. Cependant, j’avoue être encore envoûté par les mots. Il faut faire un choix, car il y a un choix immense de talents dans toutes les catégories.
En fait, tous les poètes méritent d’être connus : certains nous plaisent plus que d’autres, comme en toutes choses. Poésie rime avec amitié.
Grâce à la poésie, j’ai compris que la révolution ce n’est pas renverser un gouvernement par les armes, car tu te sers du même instrument qu’il utilise pour sa domination ; mais en créant un monde tout à fait parallèle.
Plutôt que de penser en fonction d’idéologies, religions, partis politiques ; les gens devront apprendre à se regrouper selon leur univers de valeurs. Il faudra apprendre à s’unir et à agir en fonction de ses croyances, tout en respectant le droit des autres à en faire autant. Tant qu’il n’y a pas de violence ou de domination, tout doit être permis.
Plus le temps passe, plus les frictions seront graves et nombreuses entre pays, même entre individus. Nous embarquons lentement dans la société de la restriction. La planète ne peut plus nous nourrir tous et les riches sont trop radins pour vouloir partager.
Les manifestations.
Je n’organisais pas les actions, mais on me consultait sur leur éventuelle efficacité. Que devait-on faire pour être diffusé, comment agir pour avoir le maximum d’impact dans les médias. Un exemple : la guerre des producteurs de lait.
Pour mieux se faire entendre des députés fédéraux, les producteurs avaient organisé un face à face avec eux, à la veille des élections. Puisque ça me semblait insuffisant pour faire cracher Ottawa, j’ai discuté avec les autorités du syndicat quant au genre d’actions qu’il fallait organiser pour attirer l’attention. C’est ainsi qu’il y eut une très importante manifestation des cultivateurs dans les rues de Sherbrooke dont le thème aurait pu être : nos vaches sont à Ottawa.
Ce qui m’aidait, c’est qu’en plus d’écrire pour La Tribune, je partageais mes informations avec Québec-Presse, un hebdomadaire national, qui employait le futur ministre de la Culture, M. Gérald Godin.
On décida de multiplier les manifs à travers tout le Québec. Ainsi, plus tard, quand, M. Olsen, le ministre fédéral de l’Agriculture, est venu à Richmond, les cultivateurs l’ont reçu avec des pancartes. Il était impossible que le ministre retourne à Ottawa, sans avoir compris l’urgence d’agir. Une petite action qui l’a décidé à verser 10 millions $ pour les cultivateurs de production laitière qui risquaient de perdre leur ferme.
Ce n’est peut-être pas énorme, mais c’est le genre de résultat pour lequel je me sentais très fier et qui compensait pour la dévalorisation que créaient mes attirances sexuelles délinquantes.
Au cours d’une négociation avec les autorités fédérales, les représentants de l’UPA m’ont raconté qu’on se servait de mon nom pour faire avancer les pourparlers quand les discussions s’enlisaient. Il suffisait de dire qu’on me téléphonerait pour que ça débloque. J’étais très fier de ce pouvoir et je m’en servais toujours pour améliorer le sort des Cantons de l’Est. Dommage que dans nos sociétés, il faille de la violence pour faire débloquer les choses.
Palestine.
Dramatique de voir le parti conservateur de Stephen Harper essayer d’être encore plus conservateur la Palestine que son modèle républicain Georges W. Bush.
Harper n’a pas assez d’argent pour aider l’industrie du bois du Québec, mais il donne 300 millions $$ à la Palestine pour participer au processus de paix de Bush au Moyen-Orient.
Les conservateurs n’ont pas encore compris qu’il s’agit non seulement d’une guerre d’eau potable, mais surtout d’une guerre de religion entre juifs fanatiques et musulmans fanatiques pour ne pas dire complètement sautés.
Contrairement, à ce qui s’est passé au Liban, le Canada donne son appui à la Palestine, mais à travers un parti susceptible d’appuyer Israël. C’est mieux que la guerre, j’en conviens ; mais le Canada devrait inviter Israël à serrer un peu les armes et à respecter davantage les Palestiniens. Est-ce pour aider une population qui souffre quotidiennement de cette mésentente religieuse ou pour appuyer le parti qui est le plus susceptible de se rallier à Israël ?
On dirait que le mot d’ordre dans cette région du globe est : mieux vaut mourir dans la foi que d’avoir l’intelligence de partager un territoire où tous les dieux ont été créés par une même religion qui a éclaté à travers les siècles en de multiples religions. Pour presque chaque virgule différente, dans les divers textes, il y a une nouvelle religion.
Par contre, les morts sont réels. En ligne Israël, les USA, le Canada contre la Palestine, l’Iran et la Russie. Qui va enterrer la hache de guerre ? C’est ainsi que je perçois cette situation : la paix viendra quand se tairont les religieux.
Jérusalem ne devrait pas appartenir aucun de ces pays ou de ces religions, mais être un patrimoine mondial, supervisé par les Nations Unies, où chaque religion apprend à s’ouvrir aux autres. Il n’y aura plus de fanatisme, plus de motif de guerre, si on oublie que l’énergie, le pétrole, tue la terre.