Radioactif 234
Radioactif 234
Les Rock Machine 1.
La première fois dedans, j’y ai goûté comme je le raconte dans Laissez venir à moi les petits gars».
La dernière fois en 1996 ce fut un coup de chance que je n’y laisse pas ma peau. On m’a raconté que des gens avaient déjà acheté une bouteille de vin pour célébrer ma mort en dedans. Ce qui m’étonnait le plus, ces gens étaient des indépendantistes comme moi, mais ils me trouvaient beaucoup trop radical.
J’ai été transféré d’Amos à St-Jérôme, mais j’ai refusé d’être sous protection.
Rendu à St-Jérôme, on me plaça avec les Rock Machines. Je n’avais pas prévu que, seul dans la cour, sans gardien, qu’un gars crierait par la fenêtre que j’étais un pédophile pour que les Rock Machines réagissent. Un ticket direct pour la morgue ! Disons qu’il fait assez chaud dans de telles situations.
Je n’avais aucun moyen d’y échapper et je me suis cru déjà mort. Il n’y avait aucun garde. Mourir, pas de problème, mais je ne voulais surtout pas trop souffrir.
J’étais au centre de la cour, sous l’invitation du chef mafieux qui m’invitait à avancer et qui me demandait : T’es-tu pédophile? Puisque je crois qu’il y a un monde entre un pédophile et un pédéraste, même si ce n’était pas le temps de commencer de savantes explications, j’affirmai que non en toute conviction. Je croyais que tout le monde me sauterait dessus, mais on avait plutôt formé un cercle autour de moi. Le chef insista.
Le détracteur derrière sa vitre poursuivit en disant que c’était vrai puisque les journaux de Val-d’Or l’affirmaient. Ces drôles que mêmes des journalistes qui connaissent la différence sémantique et physique des mots continuent de refuser de la reconnaître celle entre pédophile et pédéraste. Imbécilité ou malhonnêteté intellectuelle? Ils ne savent pas chercher dans un dictionnaire.
J’ai maintenu ma position et je me suis contenté de lui dire que les journaux ne savent pas de quoi ils parlent. Le chef s’est alors adressé à un autre prisonnier qui venait d’arriver d’Amos avec moi pour avoir son avis. Ce dernier leva les épaules et avoua n’en rien savoir.
Le chef mafieux s’est contenté de me flanquer une claque par la tête et m’envoyer dans la cuisine du local, me demandant de rester dans ma cellule et ne plus me montrer le bout du nez.
Quand un garde s’est présenté, le chef cria : « Tu me sors ce Christ-là d’ici, sinon tu retrouveras un cadavre.»
Le gardien m’amena et on me plaça sous protection. Je me déplaçais accompagné de gardiens comme si j’avais été chef de la mafia.
06 Novembre 2007
Silence, on tourne…
Dans ma vie, je n’ai pas toujours été détesté par tout le monde. En enseignant, je n’avais que le choix de me taire. Je pouvais me sentir authentique et sincère avec certains amis qui me connaissaient comme amant des garçons.
Habituellement, je ne mentais pas, mais je répondais que j’aime tout, surtout les petits serins. Qui veut comprendre comprend.
Je l’écrivais depuis 1968, mais je n’étais pas assez fou pour faire cette lutte au grand jour alors que j’enseignais. Je suis d’ailleurs extrêmement fier d’avoir pu enseigner durant 15 ans et pouvoir me vanter qu’aucun de mes anciens élèves ne peut me dénoncer, car il ne s’est jamais rien passé avec eux quand je leur enseignais.
Je crois encore que ma vie privée n’a rien à voir avec mon enseignement. Juste pour donner l’exemple, j’ai été de nombreuses années sans boire. Si j’en parlais avec certaines gens autour de moi, je ne pouvais pas en parler à n’importe qui, car je pourrais le regretter pour le reste de ma vie.
Dès que j’ai été accusé, je suis devenu pour plusieurs le sujet de toutes leurs calomnies. Je n’ai jamais vécu complètement à la cachette. Les gens me voyaient avec les jeunes de qui j’étais amoureux et ils s’en doutaient bien. Ces jeunes étaient très heureux de me connaître. Pourquoi, du jour au lendemain, tu deviens la saleté des saletés? Parce que Dieu l’a dit? Quand ? Tes juges tombent-ils sur la tête? Je suis le même gars avant, pendant et après.
C’est un jugement que je trouve un peu, beaucoup malade. Tout le monde s’en doute, mais dès que c’est officiel, c’est pire que si tu avais attrapé la peste. Pourquoi les gens se mêlent-ils de tes amours ? La charité chrétienne ?
D’ailleurs, la condamnation n’a aucune proportion avec le délit, s’il y a faute.
C’est cette hypocrisie morale que je dénonce depuis des années… Jésus l’avait dénoncé : le brin de foin dans l’œil de l’autre contre la poutre dans le tien.
Le Québec scrupuleux est le Québec hypocrite…
07 Novembre 2007
Un autre point de vue.
Ma pédérastie m’a forcé à ne pas avoir le même point de vue que tout le monde.
D’abord, c’est peut-être une application trop fanatique de l’Évangile. Tout est amour. Tu ne juges personne et tu es né pour être heureux et créateur. Tu essaies de te réaliser pleinement puisque la vie est une série d’expériences.
Si je n’avais pas refusé de payer 0.25$ pour une petite séance de masturbation, parce que je croyais que l’amour ne s’achète pas, je n’aurais jamais fait de prison la première fois et j’aurais certainement eu l’occasion de répéter l’expérience. Puisque c’est une façon facile de se faire de l’argent. le jeune serait revenu me trouver pour retrouver plaisir et argent.
Puis, si j’avais refusé d’aider un ami qui ne venait pas à bout de son fils et qui me menaçait de se suicider, je n’aurais jamais été pris au piège, à Val-d’Or, et je serais peut-être encore professeur. J’aurais été un peu plus l’hypocrite que je dénonce dans mes livres.
J’aurais trouvé plus d’avantages à me la fermer qu’à prôner une meilleure compréhension de la véritable ampleur des inconvénients à vivre une sexualité perturbée.
Je serais plus fier, mais serais-je aussi heureux d’avoir connu tant de belles expériences? Mes seuls regrets sont de ne pas avoir su sauver Rouhed et Petit Gabriel de la drogue… un enfer bien pire que la vie sexuelle.