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Un sourire venu d’enfer.

octobre 31, 2020

Un sourire venu d’enfer 14

Autobiographie approximative

Page 103 à 110

21

Mario

À cette époque, je me rendais quelque part sur la rue King, à Sherbrooke,  quand j’ai aperçu deux magnifiques garçons au terminus. L’un était un peu plus vieux que l’autre, mais ils étaient tous les deux jeunes et beaux. J’ai poursuivi mon chemin afin de compléter ma commission, car, ce soir-là, j’attendais des amis de Montréal.

À mon retour, il n’y avait plus de jeunes. Je me suis rendu aux toilettes et je les ai aperçus, en revenant au haut de l’escalier, près des appareils téléphoniques. Je me suis installé à côté d’eux et j’ai simulé une conversation téléphonique afin de pouvoir les observer. Les jeunes en ont profité pour se rapprocher  dès  que  j’eus accroché le téléphone. Ils m’ont affirmé venir tous les deux de Montréal  voir un ami.

Ça me semblait assez invraisemblable, car jamais je n’aurais autorisé mon fils à se promener aussi loin sans être présent. La pédérastie est plus responsable qu’on veut bien le croire. La préoccupation du bien-être de l’amant est une obsession. Un pédéraste ou amourajeux ne veut pas que son amant souffre. Il défend son bien-être comme tout amoureux.

Ça ressemblait plus à une fugue. Les jeunes étaient trempés jusqu’aux os et ne savaient pas où aller pour se réchauffer.

Je les ai invités chez moi. Ils m’ont suivi avec joie. J’étais déjà au paradis…

À la maison, j’ai fait couler un bain pour le plus vieux qui semblait plus transi et qui prétendait avoir mal aux pieds. Je l’ai invité à s’y laver et se réchauffer les pieds. Je l’ai aidé à enlever ses chaussures. Je lui ai baigné les pieds et les lui ai

frictionnés. Il sourit. Une invitation? Je ne peux pas résister. Ma main saute un peu plus haut. J’y découvre une cuisse ferme. Le cœur me palpite au-dessus de la vitesse de la lumière. Son sourire est encore plus angélique. J’ose. Il est bandé. Le feu de son regard élimine tous les doutes quant à son approbation. Je veux m’arrêter, mais il me presse de continuer affirmant que cela lui fait grand bien.

Je l’aide à sortir du bain, je le déshabille, mais j’arrête quand il affirme que son copain ne connaît rien à ces jeux alors que lui, au contraire, est un expert des rues de Montréal. Il prétend y travailler pour 20 $. Le lit est défait pour y recevoir le plus jeune et je descends un matelas où je m’installe avec le plus vieux.

Dans le noir, ce sont les caresses mutuelles précédant un 69 qui nous font savourer les mathématiques.  Soudain, la lumière nous saisit nus, allongés l’un  à côté de l’autre. Mario, le plus jeune, est penché sur nous et siffle un « ah! Je sais ce que vous faites.»

Nous rions. Mario nous fait lever à tour de rôle. L’aîné a une petite graine de quelque trois pouces, non circoncise. Il s’amuse à faire lever et descendre son petit oiseau. Mario nous fait tourner sur nous-mêmes, question de nous examiner les fesses.

Et toi?

Il hésite. Il ne veut pas se montrer. « Elle est trop petite », dit-il. Nous cessons de nous occuper de lui. Alors que nous sommes assis sur notre matelas, près du lit qui nous surplombe, Mario se lève et commence à danser. Nous l’examinons comme si nous assistions au jeu d’une effeuilleuse. Mario descend et monte son short en toute vitesse. Nous protestons. Il recommence plus lentement. Il est maintenant devant nous, nu, magnifiquement beau, même si son membre n’a rien de spectaculaire. Je me lève et je lui passe la main sur le ventre. Il se dandine, affirmant que ça le chatouille. Il rit et aime le déroulement de son initiation.

« Comme tu vois, ça ne fait pas mal. », lui dis-je.

Il se dresse devant moi et se jette dans mes bras. Je l’embrasse sur le ventre, puis sur les cuisses. Mario frissonne de tout son corps. Je jubile, j’explose quand je laisse son petit zizi se réchauffer entre mes lèvres tandis que l’aîné me masturbe. Le plaisir se poursuit un bon bout de temps. Une éternité à la seconde. Mario a tellement aimé l’expérience qu’il veut terminer la nuit avec moi.

Plus tard, dans la nuit, neuf visiteurs nous arrivent effrayés puisqu’ils ont été chassés par la police alors qu’ils avaient des drogues en leur possession. C’est le scandale. La panique.

En plus de leur peur précédente, je leur ajoute celle de me retrouver couché avec des mineurs.

Je m’installe seul avec les jeunes dans la chambre près de la cuisine alors qu’eux couchent dans une autre chambre pour ne pas être complices.

Le lendemain, je vais travailler à reculons. Je n’ai pas dormi de la nuit, ayant caressé Mario, qui s’endormit, lui, comme un chat ronronnant de satisfaction. Je vais faire une commission. J’embrasse le plus vieux au départ et au retour à la maison. Le bonheur ne peut pas être plus complet. Je décide d’aller prendre une bière avec mes visiteurs et de laisser les jeunes à la maison. Je les retrouverai dans une heure ou deux.

À mon retour, plus de jeunes et plus d’argent. Ils ont vidé tous les tiroirs et pris tout ce qui les intéressait. Quelle folie ! S’ils m’avaient attendu, ils auraient été encore plus gâtés. Les pédérastes amourajeux sont forts sur les cadeaux comme l’étaient les pédérastes du temps de Platon. Les cadeaux sont une manière de faire la cour à quelqu’un qui te plaît. Je leur aurais sûrement tout au moins payé les billets pour retourner à Montréal.

On m’a raconté que le lendemain les jeunes avaient été surpris dans une auto- patrouille. On disait que Mario était de Sherbrooke, qu’il était le fils d’un policier. La peur n’arriva pas à me faire oublier cette première nuit de plaisirs. J’avais peur, mais les jeunes m’avaient volé avant de partir ce qui me protégeait d’une certaine façon.

Je fume un joint avec mes compagnons durant ma promenade, ceux que je croyais des felquistes me réprimandent. Ils me reprochent mes extravagances dangereuses. Je ne trouve rien d’autre à dire pour me défendre : « je ne suis pas un oiseau qu’on garde en cage.»

Le lundi ou le mardi, je reçois au journal un appel des jeunes : « As-tu eu beaucoup de plaisir dans la nuit de samedi?»

C’est de toute évidence, une tentative de chantage. Juste au moment où il ne faut surtout pas que je me fasse arrêter à cause de mon travail d’animateur avec les gars de la construction qui entreprennent une lutte contre une diminution de salaire.

Je fixe rendez-vous en en demandant qu’on me donne du même coup les 20 $ volés. Je n’entends plus parler de rien.

J’ai aimé Mario à la folie. S’il a servi à me tendre un piège tant pis. Il était quand même adorable. J’espère seulement que cette expérience lui a donné confiance

en lui et l’a rendu heureux. C’était un ange dans mon lit, d’une beauté plus que fascinante. Un visage avec un sourire dans la peau quand il dormait. Je lui aurais donné le monde entier pour l’avoir plus longtemps. Cependant, je n’aurais jamais accepté de me prostituer dans mon travail pour continuer à avoir des rapports sexuels que ce soit avec lui ou avec tout autre d’ailleurs.

La vie est ainsi faite. Je ne l’ai jamais revu. Il a tellement hanté mes désirs que j’ai écrit une nouvelle à sa mémoire MARIO.

C’est peut-être mon texte le plus monotone, mais c’est celui qui définit le mieux ce que je ressens face à la révolution culturelle. Un concerto de Schubert en paroles.

J’ai poursuivi mon travail à la CSN, oubliant cet incident.

Les histoires selon lesquelles la police essaie d’obtenir des informations en t’amenant dans un bois pour jouer à la roulette russe sur le crâne avec leur revolver ou la raclée sans qu’il y reste de marques auraient dû suffire à me forcer à démissionner. J’ai tenu bon.

J’étais pédéraste et je l’assumais. J’avoue que c’était encore une façon bien animale de vivre ma pédérastie. J’apprenais sur le tas. Les questions venaient au fur et à mesure. C’est ainsi que se sont développées ma perception et ma conception d’une morale sociale acceptable pour un pédéraste.

22

John Simonez, tabarnak !

Alors que j’étais animateur pour les gars de la construction, nous  avons  entendu dire que la Commission sur la Constitution canadienne, présidée par le sénateur Molgat, viendrait siéger à Sherbrooke. Tous les médias devaient assister à cet événement, créé exprès chez nous pour prouver les mérites de la bonne entente français-anglais.

Je me suis aussitôt mis à la rédaction d’un manifeste qu’on appela : le manifeste du royaume des amorphes.

Pour donner plus de poids sur le plan provincial à cet écrit, nous avons eu recours à un groupe d’étudiants, dont mon ami Jean, pour en faire la distribution, lors de la première d’un film. Cet exploit ne manqua pas d’éclat. Le manifeste avait bon ton et se terminait par « avec ou sans vous, nous vaincrons ». Les étudiants portaient des foulards aux couleurs des patriotes et, à notre surprise, le matin, la radio parlait d’un communiqué du FLQ. La chose fut démentie le plus tôt possible.

Au cours d’une assemblée des gars de la construction de la CSN, le manifeste fut accepté par les travailleurs et il avait été décidé de le remettre aux membres de la Commission Molgat.

Certains dans le groupe espéraient au contraire que l’on ne se serve pas de ce document puisque j’en avais fait seul la rédaction quoique les sujets fussent issus de nos ateliers de travail en vue d’une plus grande sensibilisation de ces futurs leaders aux problèmes des Vauxcouleurs (Estrie).

On voulait aussi faire connaître par cette publication les problèmes de la région à l’extérieur, but qui devait être très bien atteint afin de nous donner du poids auprès des gouvernements. Quant aux moyens de pression, ils furent d’une efficacité indéniable. J’avais exhorté les travailleurs à ne jamais utiliser la violence sous toutes ses formes. Souvent, le système se sert de casseurs pour détourner l’information. On parle de la casse et non du pourquoi des manifestations. Ce fut tellement vrai qu’Alain Guilbert, en vrai pourri, a écrit un éditorial biaisé à la suite de cet évènement.

La non-violence a toujours été une condition préalable à toutes les actions auxquelles j’ai participé. Malgré cette demande, certains me pointaient, en me surnommant le Paul Rose de la région. J’avais une telle admiration pour le FLQ que j’y voyais un des plus beaux compliments de ma vie. Puisque je ne suis pas orgueilleux, j’ai accepté volontiers de passer pour un coq.

Plus j’avais peur, je pense, plus je me prenais pour un dur. Je me défendais contre un système d’exploiteurs.

La soirée ne se déroula pas comme prévu. Au début, les travailleurs ont remis le manifeste à tous les commissaires.

Les délibérations ont commencé, et plutôt que de nous respecter, les sénateurs parlaient seulement anglais.

Sans se consulter, une toux se propagea à la majorité des poitrines dès qu’un mot anglais était prononcé. Ce fut un fouillis général, malgré les appels à la discipline du maire et du député de Sherbrooke. Cette toux resurgissait aussitôt que les commissaires s’exprimaient en anglais devant une assistance à 98 % francophone.

Dans l’enthousiasme, j’ai décidé de faire connaître aussi mon opinion. De toute évidence, les commissaires ne voulaient rien savoir. Ce n’était pas le message que les médias devaient passer.

Quand je me suis présenté, M. Molgat m’a demandé à au moins trois reprises de

répéter mon nom sous prétexte de ne pas comprendre. Je lui ai alors répondu :

« John Simonez, tabarnak ». (prononcé à l’anglais) Ce qui marqua le début de la contestation.

J’ai invité les travailleurs à me suivre à l’extérieur. J’ai quitté la salle le poing fermé levé comme dans tous les gestes de révolution.

Le député fédéral de Sherbrooke, M. Paul Gervais, en profita pour demander au journal de manifester de façon concrète sa désapprobation aux propos que j’avais tenus. « Il vient enfin de faire connaître son vrai visage », de dire le député.

Nous sommes allés à l’extérieur chercher des pancartes en chantant. Certains ont essayé, en notre absence, d’obtenir des excuses du député, excuses qui ne vinrent jamais. Mes patrons de la Tribune étaient présents. En aucun moment, il n’y eut de violence. Le lendemain, le journal mentait en faisant croire que le député de Sherbrooke, M. Gervais, avait été menacé. Il me semble cependant que certains travailleurs avaient dit à « mes boss » que si j’étais congédié comme le demandait le député Gervais, c’était pour La Tribune, le baril de poudre et six pouces de mèche qui les attendaient.

J’ai été étonné d’autant de solidarité. Je n’ai pas été surpris quand les gars ont décidé d’occuper le journal si le manifeste n’était pas publié intégralement. Pour eux, la Tribune publierait pour une fois la vérité si le manifeste s’y retrouvait.

La réplique de l’establishment n’a pas tardé.

L’Association des cités et villes a organisé une assemblée spéciale, à Richmond, invitant contrairement à son habitude, tous les médias.

Les maires de la région ont écouté le maire de Sherbrooke, M. Marc Bureau, récité un texte farfelu et plus qu’idiot, dans lequel celui-ci dénonçait les agissements d’une cellule d’information du FLQ, travaillant à Sherbrooke et reliée aux terroristes de Montréal.

Il n’y avait pas de doute, il s’agissait de moi. Moi et qui? Quel rapport avais-je avec Montréal? Je collaborais avec l’Agence de presse libre (la même qui fut volée par la police fédérale) pour diffuser à l’extérieur les nouvelles que La Tribune refusait de rendre publiques. Je coopérais aussi avec un mouvement  qui combattait la construction de l’autoroute est-ouest. Le but de cette union était de faire valoir que les argents devant servir à construire cette autoroute que les Montréalais ne voulaient pas servent plutôt à la construction de la Transquébécoise que tout le monde voulait chez nous.

Autant que je sache, l’Agence de presse libre n’a jamais été reliée au FLQ, mais

aux mouvements de la gauche montréalaise et le groupe contre l’autoroute est- ouest était fortement enraciné dans la population anglophone.

La GRC doubla ses effectifs à Sherbrooke. Devant les enquêtes qui s’annonçaient — nous n’avions rien à cacher, rien fait d’illégal ou de violent — aussi avons-nous invité la police à participer à nos délibérations.  Malgré cela,  j’ai reçu au journal la visite d’un officier de la Sûreté du Québec qui voulait m’entendre dire que j’avais rédigé le manifeste. Comme nous l’avions convenu en assemblée, j’ai refusé de répondre à ces questions. Le dire aurait été de l’orgueil mal placé.

Plus tard, certains me l’ont reproché disant que j’avais ainsi fait rejaillir la responsabilité sur tout le monde et fait en sorte que l’enquête se poursuive. J’avais simplement fait ce qui avait été décidé en réunion.

L’agent est reparti, en claquant sur mon pupitre avec son bâton, et en me criant que l’on n’attendrait pas que je sois un second Charbonneau, un felquiste de la cellule Libération, avant d’agir. Il ne savait pas que je ne connaissais pas les felquistes. Tout ce que je connaissais du FLQ, c’était ce que je le lisais dans les journaux comme tout le monde. Certains m’ont alors reproché de jouer la vedette, mais je réagissais comme je pouvais à une tempête pour laquelle je n’avais pas été formé.

Le responsable du syndicat à la Tribune me fit part du désir des policiers municipaux de Sherbrooke. Ils voulaient que je sois aussi leur animateur. J’aurais à leur faire connaître, eux aussi, les problèmes de la région, à l’occasion des négociations pour leur convention collective. J’ai accepté, même si cela pouvait être un piège à ours, en me disant que si les policiers voyaient comment on se fait « crosser » par nos députés, peut-être seraient-ils favorables aux manifestants dans les luttes futures. Mon acceptation n’a jamais eu de suite.

J’étais un journaliste de plus en plus encombrant. Puisque je n’étais pas violent, il était impossible de me coffrer. M’accrocher parce que j’aime les petits gars était tout aussi improbable : il faut des plaintes et pour avoir des plaintes encore faut-il qu’il y ait des actes. Partout, je parlais de mes amours dès que je m’embarquais dans une lutte de manière à ce que personne n’ait de mauvaises surprises.

Je m’étais vite fait la réputation d’être le leader de tous les mouvements de contestation dans la région. C’était un peu vrai. Partout où les gens de la région se faisaient déculotter par Ottawa, j’intervenais.

L’agriculture comme presque tous les secteurs industriels du Québec ont été pour Ottawa la pierre d’échappement pour régulariser son commerce extérieur en faveur de l’Ontario ou des provinces de l’Ouest. Quand les fermiers de l’Ouest ou les industries de l’Ontario ont été en péril, c’est sans hésiter que le fédéral a résolu le problème sur le dos des Québécois. Nous avons toujours chèrement payé pour garder debout ce pays anglais, ce monstre économique.

Si le fédéralisme était rentable pourquoi y avait-il un problème avec les producteurs de lait? Pourquoi des fromages d’Australie plutôt que du Québec? Nous avions pourtant Oka et St-Benoît du lac? Pourquoi avoir des grains de provende?

Pourquoi au moment où les usines d’East Angus et de Windsor étaient en danger à cause de l’accaparement du marché par les Américains, Ottawa investissait-il à coup de millions dans de nouvelles usines de même type dans l’Ouest canadien, déséquilibrant ainsi plus que jamais le marché de ce secteur industriel au Québec? Pourquoi la compagnie Brascan-Labbatt 50 a-t-elle fait éclater deux fois le marché agricole au Québec? Pourquoi dans chaque cas la Tribune refusait-elle de prendre parti pour la population? Pourquoi essayait-elle de faire croire, dans le domaine des pâtes et papiers que Cabano était la cause de tous les problèmes dans ce secteur?

Le carcan se fit de plus en plus lourd à la Tribune. On avait de toute évidence décidé de me mettre à ma place, quitte à se débarrasser de mes services. Mais il fallait pouvoir motiver cette décision. Il fallait me faire taire par tous les moyens, comme si l’on ne comprenait pas que plus on essayait de m’étouffer, plus je me débattais.

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