Diogène 11
Virus s’ennuie.
Virus avait très hâte de revoir sa petite Amfèpétéléplom. Il s’ennuyait. Comment se portait-elle ? Était-elle plus ou moins amoureuse de Label Blonde ? Comment celle-ci a-t- elle réagi quand elle a su que son amante était enceinte ? Était-elle devenue jalouse de l’enfant ? Ce n’était pas son genre, mais parfois les situations font ressortir des traits de caractère cachés jusque-là.
Virus ne pouvait pas s’expliquer pourquoi il acceptait aussi bien la présence de Label Blonde, mais pour lui, elle n’était pas un élément étranger, mais une partie intégrante de son amour pour les femmes. Il pensait que c’était dans sa nature d’avoir besoin de plus d’une personne pour l’accompagner dans la vie. D’ailleurs, la jalousie n’est-elle par une forme de sécheresse de l’âme, un égoïsme, sans le nom ?
Il aimait « le gars » dans Label Blonde et la « douceur féminine » dans Amfèpétéléplom. Cette dernière était d’ailleurs la flamme de toutes les flammes. Elle devinait chaque moment où il avait besoin d’être encouragé. Sans elle, il se sentait perdu. Seul, chaque seconde était une éternité.
Ce n’était pas encore l’époque où les lesbiennes voulaient avoir des enfants à tout prix, sans avoir à coucher avec un gars. Et, les homosexuels n’étaient pas encore un objet de luxe pour bourgeoises qui veulent prouver leur largesse d’esprit afin de trouver un paternel qui ne réclamera pas l’enfant.
Comme tous les hommes d’alors, Virus était loin de se douter qu’il avait quelque chose à voir dans cette naissance, sauf y laisser une partie de soi-même.
Il avait bien pris Amfèpétéléplom, par derrière, comme tous les autres mâles, étonné que ce soit moins serré qu’avec un petit gars. Mais, en plus de ce jeu de plaisirs, entre eux, il y avait un feu intérieur qu’il ne retrouvait avec aucune autre personne.
Ils avaient consulté, mais aucun spécialiste n’avait pu leur expliquer pourquoi ils vivaient une telle attirance l’un pour l’autre.
« Cette attraction, pensait Virus, doit être une suite du passage d’Amfèpétéléplom dans le temple d’Aphrodite. Un cadeau ! Elle a un aimant intérieur qui capte mes ondes ».
C’est d’ailleurs ce que les spécialistes avaient affirmé pour expliquer qu’il ne pouvait pas vivre sans elle. Il fallait évidemment offrir des sacrifices pour demeurer dans les bonnes grâces de la déesse. Évidemment, les religions trouvent toujours une raison d’exiger des dons.
Virus aperçut par la fenêtre un petit groupe de féminounes qui s’agitaient.
Virus
Toujours aussi folles, ces kâliss-là ! Si elles ne veulent pas d’un homme parce qu’elles en ont peur du sexe, elles n’ont qu’à se trouver une femme. Elles sont complètement folles de s’occuper ainsi de la sexualité des autres. Peut-être auraient-elles besoin de « térébenthine » au cul pour aller courir ailleurs ?
Mais, les féminounes n’étaient pas sa principale préoccupation. Il avait gagné son procès. Il fallait trouver un autre bateau pour se rendre le plus vite possible au chevet de sa petite. Et, une grève des bâtisseurs de bateaux venait d’être déclenchée. Virus se rendit donc dans le port voisin pour s’acheter un bateau et louer un équipage. Le départ fut rapide.
En chemin, les matelots commencèrent à vouloir s’emparer de l’embarcation. Virus était seul. Aurait-il la force de leur tenir tête ? Aussi, mit-il le cap sur l’île des sirènes. Près de l’endroit, tous ceux qui étaient hétéros se jetèrent à la mer, une mort certaine.
Seul, un petit mousse demeura sur le pont. Il était encore trop jeune pour écouter du « Classique » et il s’amusait plutôt à jouer ses propres airs sur une chaudière. Le bruit était si fort qu’il n’entendit jamais la voix de ces mauvaises femmes.
Le plaisir, marié à l’amour, transcende le danger.
Le reste du voyage fut extraordinaire. Le mousse se plaisait à lui donner des massages. Ils jouaient à la cachette et s’amusaient comme des enfants. Cette régression eut l’effet d’une résurrection.
« Les adultes sont constipés autant de corps que d’esprit. Ils prennent la vie trop au sérieux et meurent fatigués. » Se dit Virus.
Jouer ainsi revitalisa l’esprit de Virus.
Mais, Virus n’est pas Ulysse. Il n’y a pas eu à se battre contre de grosses bibittes. Les cyclopes ne se sont pas montrés. Il n’y a pas eu de guerres avec les titans. Poséidon dormait bien tranquillement, il ronflait même un peu.
Puisque le petit aimait courir nu et grimper partout où c’était possible, un descendant direct des singes, Virus nomma ce petit chimpanzé, Chita.
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Je n’écris pas pour les adolescents. Qu’est-ce que ce message me demandant d’avoir plus d’actions ? Vous ne vous brûlez pas les doigts à m’envoyer des messages. On dirait qu’il n’y a jamais personne qui me lit. Pourtant, il y a toujours entre 500 et 800 visites par nuit. Pas un message. Le seul qui m’écrit me reproche de ne pas être comme les Américains qui vivent avec des bibittes partout où ils vont. Je n’ai pas besoin de monstres, mais le désir d’un lecteur est plus important que mes sentiments personnels. Ça faciliterait peut-être parfois les choses si on était moins exigeant. C’est à y penser. Merci, finalement, d’avoir partagé le problème d’accoucher tous les jours d’un élément nouveau. Croyez-vous qu’Amfèpétéléplom sera contente de voir Virus ou en a-t-elle assez de passer son temps à voyager ?
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* *
Les méduses… des animaux sans cerveau.
Virus se reposait et réfléchissait sur le pont du navire quand il aperçut soudain des champignons transparents et gélatineux, dans la baie. C’était justement là, où arrivait la rivière dans laquelle les Amazones jetaient les carcasses des mâles dont elles voulaient se débarrasser.
« Ce serait étonnant que ces cadavres donnent vie à des champignons », pensa-t-il.
N’ayant rien à jeter à la mer, il lança des poissons qui n’avaient pas encore été mangés. Les poissons disparurent immédiatement, pendant que les champignons proliféraient et accouraient vers les petites bêtes.
Intrigué, Virus recommença. Les poissons disparurent à nouveau dans un tumulte de plus en plus grand. Virus se dit que peut-être les poissons n’étaient pas complètement morts et reprenaient vie en retrouvant leur souffle, d’où ce bruit. Ce « splash » bizarre qui ressemblait à un sifflement de grosse baleine.
Ces cloches vivantes semblaient être capables d’avaler n’importe quoi. Elles étaient transparentes et semblaient pourtant savoir ce qu’elles faisaient et où elles allaient, même si on ne distinguait pas de tête ou d’œil.
« Ces animaux préhistoriques deviendront-ils plus gros un jour ? Seraient-ils des êtres extraterrestres, installés dans le fond des océans depuis le début de la vie sur terre ? Pourquoi n’ont-ils pas de cerveau ?
Ils ont un code génétique puisqu’ils laissent s’échapper au meilleur endroit tous les spermatozoïdes et les ovules qui se dissipent par milliards et vont attendre au fond des océans avant de naître.
Quand leur prolifération deviendra-t-elle un danger pour les humains ? » Se demanda Virus
Virus décida d’en prévenir les Amazones et s’éloigna en mer, même si cela signifiait, devoir effectuer un détour d’une journée. Il avait au moins échappé à ce qui lui semblait encore plus dangereux que les sirènes. Un animal capable de vider les océans de toutes formes de vie, s’ils se mettaient à agir en équipe.
La présence de ces animaux venant des fonds des océans n’avaient rien de rassurant, car ils n’ont aucun cerveau, mais ils sont capables de chasser. Ainsi, ces animaux ont une forme se sensibilité. Ils vivent. Ils semblent moins complexes que les êtres vivants et ils sont pourtant plus dangereux. Leur gélatine est donc dotée d’une connexion qui sert de cerveau et leur permet de se servir de poisons si forts, qu’on n’a même pas encore d’antidote.
Est-ce que les méduses pourraient éventuellement bouffer les autres animaux marins, même les humains ?
« Si ces êtres se multipliaient un jour, comme dans la baie, pourraient-ils éliminer toute forme de vie dans les mers et les océans, puisqu’elles bouffent aussi le plancton ? Ces méduses se nourrissent-elles des objets dus à la pollution ? Une vraie apocalypse ou une solution à la saleté des océans due à l’homme », conclut Virus.
Les Amazones apprennent à jouir.
À sa sortie du bateau, Virus remarqua un petit tintement qui semblait venir de la forêt. Les Amazones auraient-elles découvert la musique grecque ? « On dirait de la harpe »
Virus
Sacré Diogène, il doit avoir amené une harpe ou il a inventé un instrument qui lui ressemble. Ce doit être un autre de ces moyens pour se faire aimer ?
Ils n’eurent pas besoin de marcher longtemps en forêt avant d’être entourés par des femmes qui, loin de vouloir les tuer, les examinaient et discutaient entre elles, en rigolant.
Virus remarqua que deux d’entre elles portaient un tonneau.
« Diogène doit être mort pour qu’elles portent ces robes ou les a-t-il échangées ? Avec Diogène, tout est possible pour obtenir ce qu’il veut », pensa Virus.
Une des plus jeunes s’approcha du petit mousse et avant même qu’il eut le temps de comprendre ce qui se passait, il était nu comme un ver. Il devint très vite un cornet de crème glacée.
Au début le jeune se demandait si sa fin était déjà arrivée, mais quelques secondes plus tard, il découvrait les plaisirs du chatouillement dans le bas du ventre. « Comme c’est beau, le naturel ! » Pensa Virus.
La plus petite Amazone, ayant terminé son cérémonial de bienvenue, saisit le petit par la main et l’entraîna avec elle.
Virus, resté seul avec les plus vieilles, se demandait ce qui était pour lui arriver.
Il fut encerclé et amené au village. Elles ne semblaient pas plus dangereuses qu’auparavant. « Le sexe doit avoir remplacé la violence. » Opina Virus.
Dès son arrivée, Amfèpétéléplom fut alertée et elle se présenta comme si elle était devenue la chef des Amazones. Elle avait un beau petit bedon.
Quand elle aperçut Virus, elle lui sauta au cou et se mit à pleurer.
Virus
Où est passée Label Blonde ?
Amfèpétéléplom
J’étais resté à la maison parce que je devais terminer un travail urgent. Je ne savais pas qu’elle était partie seule, ce qui n’était pas dans ses habitudes.
On m’a raconté qu’elle est allée se baigner et qu’un mauvais sort fut, sans doute, jeté sur elle, car elle manqua de se noyer. Elle qui nageait si bien.
Mais, elle était si forte qu’elle réussit à revenir à la maison. Quelques heures plus tard, elle fut prise de fièvre et elle est décédée.
Virus se demanda immédiatement si elle n’avait pas été victime de ces maudites méduses qu’il avait rencontrées, lors de son arrivée près de l’île ; mais il trouvait, en même temps, que Label Blonde s’était baignée tellement loin de là, qu’elle ne pouvait pas en être la victime. À moins que ces bêtes sachent nager très rapidement ?
Quel choc pour Amfèpétéléplom d’apprendre l’existence de ces méduses dangereuses.
Elle ordonna que les Amazones soient réunies sur le terrain de course !
Virus eut alors le plaisir de revoir ses Appendices, ainsi que L’Assistant et Diogène, mais il se demandait où était passé son petit mousse. Il fit part de ses inquiétudes à Amfèpétéléplom
« Il ne faut pas qu’ils soient allés se baigner. Ils pourraient être en danger eux aussi », de dire Virus.
Aussitôt, on dépêcha trois Amazones à leur recherche.
Quelques heures plus tard, les jeunes revenaient, accompagnés des Amazones qui riaient de les voir se lécher à tour de rôle, en attendant l’arrivée de Virus.
Virus, en les voyant, se demanda si au début de l’humanité, la sexualité n’avait pas été découverte ainsi, par pur plaisir.
Il fit venir une des Appendices et relata la scène pour la garder en mémoire. « Ce pourrait être important quand je retournerai pour participer à la grande Commission de Périclès. »
Virus était bien décidé de comprendre pourquoi les Amazones étaient passées de tueuses à concubines. Était-ce la jeunesse de L’Assistant et du mousse qui expliquait ce changement de comportement ou la découverte du plaisir ? Diogène est aussi un très bon prof. Et la sexualité est basée sur la jouissance. Qui mieux que Diogène en connait les effets ? Pas de plaisir, pas de sperme, pas de bébés ! Toute une découverte, aidant à comprendre les règles de base d’une société. « Une société peut-elle se former sans que les membres aient du plaisir à vivre ensemble ? » Se demandait Virus.
Il décida de créer une chaire de recherches avant de quitter l’île. Mais avant, il devait savoir ce qui avait entraîné la mort de Label Blonde.
Les Amazones se réunirent comme l’avait demandé Amfèpétéléplom. Les gars furent conduits dans une hutte où ils durent attendre des heures.
La guerre reviendrait-elle le ciment de cette communauté ou les Amazones avaient-elles vraiment évolué ?
La vie des gars sur l’île en dépendait.
D’où viennent toutes ces méduses?
Depuis que Virus avait décidé de participer à la grande Commission de Périclès sur la vie et l’avenir de la planète, les questions ne cessaient de venir de partout. La vie est un phénomène tellement vaste que même le plus grand des esprits ne peut pas répondre à toutes les questions.
Touché par la venue des méduses, Virus commença à se demander si ces êtres n’étaient pas des extraterrestres qui avaient abouti dans le fond des océans, il y a des centaines de millions d’années. Sont-elles des astronautes, cachées dans les météorites et garder en vie, grâce aux volcans sous- marins ? Sont-elles responsables de l’arrivée de la vie sur terre ?
Virus n’avait pas encore l’équipement de plongée nécessaire pour aller voir. Il devait se contenter des explications religieuses… une parade de Poséidon pour devenir le maître suprême. Le dieu avait-il tenté que les mers, son domaine, envahissent les terres ?
Virus se sentait habité par une nouvelle responsabilité.
Il devait protéger Amfèpétéléplom et son enfant.
Virus ne se demandait pas seulement ce qui se passait avec les méduses ; mais aussi pourquoi la pollution créait des problèmes de reproduction ? La pollution est chimique. L’électricité est électromagnétique et l’homme est un ensemble des deux.
C’était donc une question fondamentale pour la survie des Amazones.
La pollution crée aussi une situation inquiétante pour le sperme. Plus la pollution est grande, moins le sperme est riche en spermatozoïdes. Ils meurent. Comment trouver le juste milieu entre la propreté excessive et la pollution pour sauver le sperme des mâles qui s’installent sur l’île ?
Dès les débuts des funérailles de Label Blonde, Amfèpétéléplom mit les points sur les « i ». Pas question qu’elle devienne la nouvelle chef. Elle avait décidé de suivre Virus sur le continent, car elle voulait, elle aussi, comprendre pourquoi les humains ne sont pas capables de s’entendre et vivre en paix entre eux et avec la nature.
Pourquoi les hommes ne peuvent-ils pas contrôler leurs émotions ? Pourquoi les hommes, seuls êtres vivants pouvant gérer leur nombre d’individus de façon à ne pas dépasser ce que la terre peut offrir pour survivre, ne sont pas assez intelligents pour réexaminer leur reproduction, leur sexualité ? Faut-il des catastrophes pour que l’homme réfléchisse ?
Virus était déjà un peu vert.
Virus préparait aussi une intervention dans laquelle il voulait démontrer que ça allait mal sur terre, à cause d’une institution fondée par les religieux : les banques.
Virus croyait qu’en mariant banques et commerce, la société donnait naissance à l’économie, le pire cancer pour les sentiments humains parce que la violence naît avec le besoin de toujours en avoir plus.