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Diogène 7

juillet 18, 2020

Platon est soigné.

Dès    que    Périclès    apprit     que    Platon     était dangereusement malade, il fit appel aux meilleurs médecins existants pour le sauver.

Ce grand homme de la Grèce antique ne voulait pas manquer son coup dans l’organisation de sa grande Commission d’enquête, qui devait déjouer le temps et l’espace, et permettre ainsi d’analyser ce qui peut arriver dans l’avenir à partir des données de son époque.

Périclès connaissait le vrai sens du mot politique, c’est- à-dire savoir se tenir au-dessus des intérêts particuliers ou de parti pour offrir la meilleure vie possible aux citoyens.

Hermès avait déjà créé la boucle électromagnétique, même s’il avait un peu triché. Ça avait d’abord engendré des problèmes, mais il travaillait depuis à la mettre au point.

Hermès ajouta un sélecteur, soit un instrument qui permet d’amener à la réalité, à l’instant même, tel ou tel individu plutôt que tel autre.

Il lui fallait expérimenter l’espace spatio-temporel utilisé dès que possible.

Au pire, on y découvrirait le dieu Ra, courant dans le couloir temporel. C’est connu que les rats adorent les corridors pour entrer d’urgence à la maison.

Périclès

Nous essaierons de sauver Platon à partir de nos connaissances, mais si on n’y arrive pas, on se servira du bouclier d’Hermès. De toute façon, il doit être prêt, depuis le temps qu’Hermès s’amuse à le sophistiquer.

Il faudra bien s’en servir un jour. Peut-être que les médecins de l’avenir auront raison de maladies dont on ne connaît pas même pas encore l’existence.

Dans un premier temps, aidé de Croisos et de Diogène,

Platon fut amené au temple d’Apollon, où le dieu Péan devait faire ses preuves.

Diogène

On perd notre temps, les dieux sont capables de s’occuper que d’eux-mêmes, comment voulez-vous qu’ils sauvent notre Platon national ?

Croisos

Ce n’est pas en restant là, à le regarder, qu’on le sauvera. On va tout essayer, qu’on y croie ou pas. L’important, c’est le résultat.

Dès son arrivée au temple, on prépara l’endroit pour donner une cure d’incubation au philosophe. Sept prêtres se couchèrent chacun leur tour sur Platon, espérant que la chaleur ferait éclater la maladie, de manière à pouvoir l’identifier, puis la soigner.

La maladie de Platon refusa de s’identifier. Même pas un tressaillement. Pas un râle.

On décida, par la suite de le plonger alternativement dans de l’eau très chaude, puis très froide. Même dans l’eau, Platon ne réagissait pas. Rien. Même pas un plissement supplémentaire ou une baloune.

Croisos

On devrait peut-être le tenir sous l’eau un peu plus longtemps. S’il est pour s’étouffer, il réagira bien avant. Il doit respirer sous l’eau, c’est sûr.

Périclès

Pas sûr. La semaine dernière, on amena six malades qui n’étaient pas en danger de mort ; mais après les avoir plongés trop longtemps, ils sont tous trépassés. Ils voyagent maintenant au fond des enfers ou ils attendent, près du Styx, pour leur balade en bateau.

Pendant que Platon se prenait pour un sous-marin, et, que tous ses moteurs étaient en repos, Croisos accepta de monter les marches du temple à genoux, ce qui devait inciter les dieux à la compassion.

Croisos en ressortit les genoux en sang et dut marcher avec des béquilles durant quelques jours.

La prière n’avait eu aucun effet. Platon était mou comme de la guenille, les yeux révulsés, et la face blanche. Seuls les poils sur son ventre s’agitaient comme des brins de foin sous le vent. Faute d’aller mieux, on décida de lui appliquer une cure thermale, basée sur les propriétés de la boue employée pour le traitement. Pas plus de succès. Tout le monde était au bord du désespoir.

Hippocrate se disait impuissant, car aucun organe ne semblait touché. Quant à Érasistrate, il émit l’hypothèse que Platon n’était pas paralysé parce qu’il s’était écrasé une couille, mais qu’il s’agissait plutôt de l’effet négatif du départ de Virus. Ça l’affectait tellement qu’il avait décidé de mourir. Un suicide affectif.

Croisos

Le petit baptême ! Lui, pis sa maudite orientation sexuelle.

Hippocrate

Les nerfs ! Chacun sa réalité. Que tu sois une femme ou un homme, ou les deux à la fois, ça change quoi ? Tu es ce que tu es, et, ceux qui ne veulent pas l’accepter sont des malades.

Croisos

Si être hétérosexuel était normal, nous, les gais, nous ne formerions pas 90 % de la gent masculine.

Périclès

Ce n’est pas le temps de discuter. Quand la Commission sera formée, nous aurons tout le temps d’essayer de comprendre le phénomène de l’orientation sexuelle et de voir ce qui est le plus normal.

Il y a peut-être plus que la démocratie qui importe aux peuples évolués. Le bonheur de ses citoyens, par exemple.

Puisque Platon ne bougeait pas d’un trait dans son voyage au-delà de nos compréhensions de la vie, Périclès décida de consulter Hermès.

Hermès s’occupe de Platon.

Impossible d’amener directement Platon au Québec, sans savoir d’abord ce qu’il faudra prévoir pour que le voyageur ne soit pas totalement perdu.

Hermès avait déjà inspiré le scénariste d’une émission de télévision et les résultats n’étaient pas concluants. D’ailleurs, ceux qui ont suivi cette série sont encore perdus comme le disait le titre de la série. Hermès avait son brevet pour les voyages dans le temps et l’espace, ce qui n’était pas le cas de ce scénariste.

Hermès, qui se sentait un peu fatigué de toujours être le messager, fit appel aux services d’un de ses étudiants en communication pour explorer ce nouvel univers. Ti-Loup fut nommé responsable du voyage. Quand Ti-Loup arriva

au Québec, quelque deux mille cinq cents ans plus tard, tout était différent, sauf le vin. « Athènes ressemble très peu à Québec, même si c’est une ville « jouquée » sur un cap », se dit Ti-Loup.

Pas de grec, peu de gais. On est tellement catholiques à Québec, qu’on se croirait en Arabie saoudite, tellement les bonnes mœurs y sont respectées. Mais, il y avait un parlement.

À voir les députés, durant la période des questions, le jeune pensa qu’il s’agissait d’une institution pour soigner les adultes demeurés enfants. Il n’insista pas, mais il se dit que ce n’était pas une mauvaise idée de ramasser tous les immatures dans une même institution. Il en prit note pour en faire profiter son maître Hippocrate.

Ajustant son appareil « infra-bruit-traduction », capable de décrypter la langue parlée, le voyageur crut qu’il était à Versailles, du temps de Louis XIV. Il ne pouvait pas savoir que le joual est un descendant de cette merveilleuse langue française, puisque même les fédérastes non constipés ne le savaient pas. Il rencontrait Jacques Parizeau que le lendemain. Par contre, il en apprit énormément sur le Québec, en assistant au Moulin à paroles de Lepage.

Devant ce spectacle, Ti-Loup était ravi de voir que les cours universitaires au Québec se donnent en plein air et pour des milliers de personnes en même temps. Il s’aperçut aussi que les idiots qu’il avait rencontrés au parlement n’étaient pas là. « Ils sont trop fous pour apprendre », pensa Ti-Loup.

Il dut cependant ajouter à son traductomètre, « la vibration spéciale », pour comprendre toutes nos expressions locales. Il avait parfois de la difficulté à saisir les nuances culturelles. Entre autres, pourquoi utilisait-on

autant le mot tabarnache, alors que les églises se vident ?

La turbulence donnait souvent des airs de forêt des dieux au corridor spatial quand on retournait pour y passer la nuit.

Ainsi, quand il se mit à lire Les derniers amours de Platon, un savant linguiste en profita pour dire qu’il s’agissait d’une erreur de grammaire. « Amour au pluriel, va voir pourquoi, est presque toujours une exception et devient féminin », de dire le spécialiste.

Simoneau dut lui expliquer que le sens du mot amour, dans ce titre, n’était pas la passion, mais Diogène, Virus et Croisos, les derniers « petits amours » de Platon. Une exception à l’exception, à cause du sens que lui donne l’auteur. Les amours dans ce cas ne sont pas des passions, des sentiments ou des histoires d’amour, mais ce sont des personnages appelés ainsi, étant tous des garçons, ils n’ont pas à se féminiser.

Ti-Loup enleva sa robe hellénique, pour ne pas être  remarqué. Il dut voler un portefeuille pour avoir de l’argent.

« Je n’aurai qu’à en imprimer plus, quand je reviendrai en Grèce », pensa-t-il, après qu’un citoyen âgé lui eut abondamment parlé de Réal Caouette.

Et là, s’accéléra une étude approfondie du Québec., en plus, de son histoire. Mission accomplie, Ti-Loup retourna chez Hermès et enregistra tout ce qu’il venait d’apprendre. Le voyage de Platon était maintenant possible.

On l’étendit sur une civière et Ti-Loup fut choisi pour retourner à Québec.

Pas facile de faire soigner quelqu’un et de le garder à la maison quand il est dans le coma. Ti-Loup servait de parent proche, responsable du vieillard. Le voyage en ambulance fut très rapide.

On décida, à l’arrivée à l’hôpital, dans un premier temps, de lui enlever les testicules. Elles avaient tellement grossi et noirci qu’on n’arrivait plus à discerner le moineau. Quand Ti-Loup a vu ça, il a cru que ça l’empêcherait de marcher. Quand on n’est pas médecin, on s’imagine toutes sortes d’explications.

Puis, on changea son alimentation. Au lieu de manger par la bouche, il dût avaler par le nez.

Ti-Loup trouvait que la médecine moderne ressemblait étrangement à une connaissance approfondie de la tuyauterie.

Mais, rien à faire, Platon était toujours dans le coma. Ti-Loup n’aurait jamais pu deviner que Platon avait déjà emprunté la route du retour.

Platon avait laissé le puit de lumière et s’était engagé dans le corridor vers la lumière initiale. Malgré les apparences, les médecins disaient qu’il était maintenant hors de danger.

Hermès et Ti-Loup ramenèrent le malade chez lui, avouant ne pas comprendre qu’après tous ces soins, il ne soit pas revenu plus neuf qu’un jeune.

On venait à peine de recoucher Platon dans son lit, que Virus franchissait le porche de la maison.

Un retour tumultueux.

Dès que Virus mit les pieds dans la maison et que Diogène le vit pour la première fois, en compagnie de ses trois amazones-mémoires, il tourna de l’œil, tant il les trouva belles.

Son tonneau était tout croche, parce qu’il n’avait pas prévu qu’il serait autant sollicité par l’attraction d’un corps étranger. Et, c’était toujours le même membre qui obéissait le premier aux lois de la nature.

En se rendant à la chambre de Platon, Diogène ne put s’en empêcher. Il posa délicatement la main sur l’arrière- train de Société. Il n’avait pas encore atteint la cible, qu’il se sentit soulever de terre. Cette fois, ce n’était pas l’extase. Il voyageait plus vite que le son. Société lui avait saisi le poignet et l’avait passé par-dessus elle. Diogène, au plancher, elle lui sauta dessus, le saisit à la gorge, cherchant sans aucun doute à l’étrangler.

Virus et les deux autres Amazones eurent bien de la difficulté à lui calmer les nerfs. On pouvait sentir dans le regard de Société toute sa haine pour les hommes comme Diogène.

Virus n’avait pas eu le temps de toutes les rééduquer complètement. Pour elles, un homme, c’est un danger, un viol potentiel. Ce n’est pas qu’elles étaient féminounes avant la lettre, mais elles ne connaissaient les hommes que sous cet aspect. Ce n’était pas de la paranoïa bourgeoise, comme aujourd’hui, mais une réalité.

Les hommes se comportaient comme de vrais cochons dès qu’ils voyaient une femme, surtout si elles avaient les seins nus. Tous les soldats qui arrivaient chez elles, tuaient, kidnappaient, violaient.

Pour leur sécurité, elles avaient dû les combattre pour éviter les invasions. Les Amazones avaient un sens profond, naturel, de la liberté, mais leur monde était essentiellement féminin. Toute féministe est, en partie ou en entier, lesbienne, que ce soit consciemment ou pas ; comme tous les hommes ont un petit fond gai.

C’est normal de préférer son sexe, mais on nous appris à en avoir honte.

Par contre, que certains n’aient pas appris à respecter le besoin absolu de consentement dans les questions de sexe était plutôt un problème de civilisation.

Dans leur jungle, c’étaient toujours les Amazones qui allaient à la chasse ou à la guerre. Elles n’avaient pas besoin d’hommes. Aucun homme n’avait d’ailleurs survécu à une visite sur cette île. Virus était le premier et il devait cet exploit à la beauté de sa petite Amfèpétéléplom. Si Label Blonde n’en était pas tombée amoureuse, Virus aurait été bon pour goûter aux mêmes traitements et être tué.

Virus (s’adressant à Diogène)

Qu’est-ce que tu fais innocent ? Tu ne sais pas que ce sont des Amazones ? Toutes, sans exception, deviennent complètement folles dès qu’on essaie de les toucher sans permission. Leur peur est proportionnelle à leur éducation.

Diogène

Elle pourrait se protéger sans essayer de nous tuer.

Virus

Les hommes ont ce qu’ils méritent. Ils ne sont pas capables de voir une belle femme sans essayer de lui sauter dessus. Je te croyais d’abord pédéraste.

Diogène

Je le suis, comme tout le monde, mais je suis un esprit ouvert, moi. J’ai ma petite amie depuis longtemps. Je ne crois pas dans toutes les imbécillités inventées par les religieux ou les philosophes. Je suis un rebelle.

Virus

Change tes manières, car, tu seras responsable de leur enseigner la langue.

Diogène

Laquelle ? Elles ont besoin de s’adoucir.

Mais, Diogène ne pouvait pas s’empêcher de rêver de devoir s’occuper de trois femmes à la fois. Finies les soirées désespérées, pensait-il, tout en frétillant de la langue. Chassez le naturel et il revient au galop.

Virus

Il t’appartient d’y arriver. J’étais là-bas le géniteur officiel. Elles doivent apprendre la douceur avant d’accepter les caresses.

La prochaine fois, tu te mettras un tonneau plus fleuri. Elles aiment la nature.

Diogène en salivait déjà. Mais, il savait que pour y parvenir, il devrait changer sa manière d’aborder une femme. Il n’était pas dans un club gai, où ce petit geste de la main s’abattant sur une fesse est perçu comme une manière d’exprimer sa fascination.

Pour calmer le jeu, Virus décida de montrer les chambres où elles habiteraient dorénavant. Il garda la plus belle pour lui et Amfèpétéléplom.

Il y eut un tumulte à l’extérieur. Virus se précipita à la fenêtre pour y voir Croisos arriver, suivi d’une bande de femmes avec leurs pancartes : « Le Diable est sur terre ».

En apercevant Virus, Croisos, en furie, refusa de lui donner l’accolade. Virus était frustré, car il était très ému et très content de revoir Croisos.

Virus

Qu’est-ce qui t’arrive, mon frère ? Tu n’es pas ravi de me voir ? Je ne t’ai pas manqué ?

Croisos

Jamais je ne te pardonnerai jamais d’avoir abandonné Platon et d’être parti au moment où cette bande de folles commençait à manifester leur imbécillité. Elles manifestent ainsi depuis des mois, depuis ton départ. Elles ne se sont même pas aperçues que je ne suis pas toi. J’espère que tu trouveras moyen de leur calmer les nerfs.

Croisos n’était nullement impressionné de voir les trois Amazones. Par contre, il fut très gentil avec la petite Amfèpétéléplom. Ils avaient connu des moments d’amitié très appréciés, alors qu’elle avait vécu chez Platon.

À la demande d’Amfèpétéléplom, les deux frères se réconcilièrent avant de rendre visite au malade.

Platon était peut-être mieux, mais il n’était pas encore sorti du coma.

Dès que Virus lui prit la main et lui souffla à l’oreille  :

« C’est moi, c’est Virus ! On m’a dit que tu veux me voir. » Platon ouvrit les yeux. Comme le médecin l’avait dit : « il doit subir un nouveau choc émotif positif pour cesser de vouloir mourir. »

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