Un sourire d’enfer 58
Un sourire d’enfer 58
Le fédéral a toujours cherché à angliciser le Québec à petites doses. Il force le Québec à privilégier les anglophones. Il entraîne les immigrants vers les écoles anglaises et permet une anglicisation lente, mais constante des francophones par le biais de la radio et de la télévision. Comme cela a été fait dans l’Ouest canadien.
Si le Parti Québécois ne fait qu’un terme, ce sera la fin du Québec français, l’assimilation ayant déjà de bonnes racines.
Le fédéral agit en provocateur. Il sait qu’il n’y a qu’un moyen d’empêcher à long terme l’indépendance du Québec : la guerre. Sans un autre octobre 1970, le fédéral est fini, si les Québécois se tiennent debout et votent pour leur indépendance.
Je ne pouvais pas faire le jeu du gouvernement libéral. Tout ce que je dis est strictement mon opinion personnelle et je ne suis pas comme Ryan, guidé par la main de Dieu.
Rhinocéros, j’ai déjà eu cette discussion avec un gars que je croyais correct dans la Tribune, de Sherbrooke. « Tu peux toujours te faire avoir, sans le savoir.»
Suzanne aurait-elle été complice de la police ? Impossible. Elle n’était pas membre du Parti québécois, elle était libérale ; mais je l’aurais plutôt classée dans la go-gauche. Cette discussion avait tout pour devenir pessimiste ou un peu plus paranoïaque.
Heureusement, un événement plus important s’est produit. J’ai été fasciné par un petit Haïtien qui devait être déporté lui aussi, sans qu’il y ait de raisons majeures. Le fédéral n’a pas de cœur avec les immigrants francophones. Les immigrants n’ont aucun moyen de se défendre : pas d’avocat, pas d’appel. Un autre racket.
Ce jeune haïtien était demeuré au Québec après ses études. Il acceptait son sort et ne voulait aucune intervention extérieure. Si je l’aurais bien rencontré dans un petit coin, à l’abri des regards, je vous jure que je ne lui aurais pas fait mal. Il n’y a que les imbéciles qui croient qu’une pipe peut te traumatiser.
Pas de chance. J’ai dû me contenter de l’examiner dans la douche commune, en attendant de le remplacer. J’ai toujours été attiré par les jeunes de couleurs et les autochtones. Ils ont les fesses fermes, super belles à regarder et sont très jeunes déjà bâtis comme des étalons. Je les trouve très envoûtant quoique je préfère une petite bite.
Avec l’été, nous avons pu nous servir de la piscine. J’en ai profité pour serrer un peu le petit haïtien, en jouant avec lui dans l’eau. Ils ont la peau encore plus douce que la nôtre. La sienne était inimaginablement intéressante à caresser, en luttant. Par la suite, il fut plus facile de se rencontrer, car il semblait bien aimer ma présence et mes caresses.
La mode estivale était de se griller au soleil. C’est alors qu’on a inventé l’histoire des vacanciers venus se dorer la bedaine à Bordeaux Beach. Cela neutralisait chez plusieurs la honte d’être en prison. L’humour a une force incroyable sur le psychisme humain. J’ai rarement vu un chien s’étouffer de rire. Le pouvoir du symbolisme.
J’ai rencontré un drôle de bonhomme qui prétendait illégal d’être emprisonné pour ne pas avoir payé ses billets de circulation ou de stationnement. Si c’était vrai, notre aile aurait été vidée d’au moins 80 % de ses effectifs. C’est dire que le système respecte la loi quand ça fait son affaire.
Finalement, il devait dire la vérité, car il fut libéré. C’est d’ailleurs lui qui m’a montré les articles de lois qui faisaient que mon procès avait été illégal, à cause la présence des enfants en dehors des témoignages. Poursuivre un accusé après qu’un premier juge se soit récusé, c’est du harcèlement.
Il ne me restait pas beaucoup de temps à faire. Les deux mois s’étaient bien passés. À ma surprise, j’ai été invité à rencontrer un des chefs de la mafia de Montréal qui était là à cause de la CECO.
Il m’a confié avoir été coffré non seulement parce qu’il avait refusé de reconnaître Cotroni comme parrain, mais aussi, et surtout, parce qu’il était membre actif de l’Union nationale. Selon lui, ce serait la raison principale pour laquelle il n’aurait pas bénéficié de la même clémence que les autres. Il se disait ainsi un prisonnier politique.
À ma connaissance, il avait été condamné à un an pour outrage au tribunal parce qu’il refusait de témoigner. On m’a dit que dans la pègre, si tu témoignes t’es un mort en sursis. Papa ajoutait « quand tu es avec eux, tu n’en sors que les deux pieds par devant. »
Je n’ai pas trop bien tout compris quand il affirmait que le parti libéral a toujours utilisé des moyens pas trop propres pour gagner les élections. Il a même prétendu avoir déjà été enlevé et séquestré par les libéraux, lors d’une campagne électorale. Prisonnier politique ou non, cela ne m’enlevait pas mes préjugés sur la pègre. Je ne pourrai jamais appuyer l’existence d’un mouvement qui utilise la violence pour gagner de l’argent.
— Nous ne sommes qu’un groupe d’homme d’affaires, disait-il.
Au fur et à mesure qu’il parlait, je me demandais si la mafia n’est pas qu’une secte à l’intérieur du système judicaire qui opère à l’échelle mondiale.
Les incendies criminels à Montréal nous font s’interroger quant aux liens entre les grosses compagnies et le gouvernement municipal, puisque ces incendies permettent de créer des aires de stationnement, et les incendiaires ?
Pourquoi l’enquête sur les viandes avariées a-t-elle servi qu’à éliminer un concurrent francophone, à Magog ? Les autres compagnies anglophones utilisaient les mêmes moyens. mais on n’en a jamais entendu parler.
Pourquoi si la loi n’est pas un racket pour faire travailler le plus d’avocats possible, et le plus longtemps possible, la loi n’est-elle par réécrite de façon à être modernisée ?
Selon lui, je devais accepter de me prostituer un peu, car, du côté du pouvoir, je pourrais agir plus efficacement.
— Ce n’est pas en te battant inutilement que tu feras passer tes idées. L’important, ce n’est pas d’avoir des idées, mais de leur faire rapporter de l’argent.
Pourquoi le hasard faisait-il que je rencontre en prison un organisateur conservateur, un ami du ministre de la Justice du Québec et deux autres prétendus prisonniers politiques ? Ça fait beaucoup de hasards.
Est-ce qu’en étant politisé, j’attire automatiquement vers moi tout ce qui tourne autour de la politique ?
Même si Bourassa avait une chienne de moi, je ne faisais quand même pas branler le gouvernement à moi seul.