Radioactif 386
Radioactif 386
Texte de 2008
L’école et le sexe.
J’étais séduit par l’approche de la sexualité d’A.S. Neil, dans Libres enfants de Summerhill.
Évidemment, parce que je défends la pédérastie, il ne faut surtout pas que je le dise, pour éviter que mes détracteurs affirment qu’il en est ainsi parce que je cherche un petit gars. Ces gens sont très forts, ils savent même mieux que toi-même ce que tu penses et tes intentions les plus secrètes. Il faut nourrir ses calomnies, donc, créer des procès d’intention comme jadis à l’époque de l’Inquisition.
Ce n’était pas le cas, malgré mon intérêt pour la beauté des gamins qui se maintenait au cours des ans. Plus tu te présentes comme pédéraste, plus t’as de chances de continuer à vivre ta « sainte chasteté » parce que tout le monde te surveille, mais parfois, ce peut être aussi le contraire, ça peut enclencher des merveilles.
Heureusement, Suzanne s’occupait de mes petits bijoux de famille. Je ne vivais pas dans la peur que la poche m’éclate parce que j’oubliais de la vider. Les scrupuleux peuvent se servir de tous les arguments, émanant de qui que ce soit, leurs intentions sont toujours nobles et propres. Ils combattent la nature humaine parce qu’ils sont incapables de réfléchir par eux-mêmes, en dehors de ce qui leur a été inculqué. Ils sont comme Lucifer devant Dieu : ils refusent de reconnaître la beauté de l’élan créateur. Ils ne remettent rien en cause : l’ordre établi est nécessairement la vérité et un gage de justice.
C’est pourquoi la majorité des humains crèvent de faim à cause de l’augmentation du coût de la vie, grâce à la mondialisation. Ils peuvent crever, semble-t-on dire, ils sont tous noirs. Seuls les gens de notre religion peuvent se vanter d’être « les purs de la Bible ou du Coran ».
J’étais ravi parce qu’enfin je lisais des expériences qui confirmaient ce que j’avais compris de la vie. Ce livre est plus vrai, plus réaliste que tous les motifs de culpabilisation invoqués par nos âmes chastes et conservatrices qui s’occupent obstinément de notre comportement sexuel pour compenser leur vide intérieur. Hors de la chasteté, point de salut ! Cette hypocrisie me révoltait.
Comment ne pas être fasciné par une école qui respectait enfin ce que ma vie me prouvait comme étant la vie normale des jeunes qui ne sont pas écrasés par la morale traditionnelle et bourgeoise de leurs parents ? (Il y a une différence entre partager une foi et l’imposer. La première est normale, la seconde non. )
Cette vision de la vie, de la sexualité libre correspond mille fois plus à la nature humaine que toutes les paranoïas inventées par les religions et diffusées maintenant par les féminounes, ces réactionnaires qui se regroupent autour de certains média d’information.
Enfin, on comprenait que les relations sexuelles libres ne sont pas synonymes de violence ou de domination. Qu’il est possible que le jeune aime ça autant que l’adulte. De quels droits les autres s’en mêlent-ils ? La liberté sexuelle exige de respecter la décision de l’autre. Pas de oui, pas de cul ! Vivre librement permet de penser à autre chose et être fasciné par des comportements, par des idées plutôt que par des corps.
J’étais de plus en plus libéré intérieurement puisque, en principe, les jeunes étaient libres d’esprit et il leur appartenait de déterminer la suite des choses. Avec la liberté, c’est le jeune qui initie le jeu.
J’étais de plus en plus libéré intérieurement puisque, en principe, les jeunes étaient libres d’esprit. Je ne voulais pas les influencer, donc, la suite des choses leur appartenait. Je n’avais rien à provoquer. J’étais un observateur. Ce qui m’a d’abord surpris fut que la nudité était employée par les jeunes comme une forme de pouvoir et d’affirmation.
Je me souviens qu’un jour, en visite chez mon père, Yanie avait passé la journée avec mes parents. Yanie était une petite fille extraordinaire, attachante comme pas une, mais qui avait une tête de cochon quand elle décidait qu’elle voulait absolument telle ou telle chose.
Tout alla pour le mieux tant que je ne suis pas revenu à la maison. J’étais rendu comme sa mère. Dès que je mettais les pieds dans le cercle des relations interpersonnelles, Yanie se mettait à revendiquer toutes les libertés dont elle s’était sentie frustrée par les consignes de la vie quotidienne normale et habituelle. Ainsi, dès que j’eus mis les pieds à la maison, elle s’est complètement dévêtue, en affirmant qu’avec moi, on avait le droit à la nudité. Évidemment, ce fut une liberté vite refusée par mes parents. « Tu peux élever tes enfants comme tu le voudras, mais ici, on se vêt. » me dit mon père. C’était clair et il avait raison.
Ta liberté s’arrête, là, où celle des autres commencent. Papa trouvait ça difficile et fatiguant quand les deux petits commençaient à se chicaner jusqu’à nous rendre fou. Il me disait : « J’ai jamais vu ça de ma vie d’être assez paresseux pour prendre des enfants déjà tout faits. » Ça n’a aucun rapport puisque je n’ai jamais été paresseux. Il me disait ainsi ne pas comprendre mon choix de vivre avec une femme qui a déjà des enfants. On en était encore loin des familles reconstituées.
À cette époque, se marier c’était pour l’éternité. Et, dans notre religion, on se marie pour avoir des enfants.
Ces incidents ont drainé ma foi dans l’idéologie de l’enfant -roi.
Je considérais de plus en plus qu’un adulte doit aussi leur apprendre les limites que nous vivons tous, même si j’étais très ouvert à la liberté la plus absolue.
Je trouvais irréaliste de laisser les enfants vivre entre eux sans jamais intervenir. Quel péché mortel pour un révolutionnaire.
Quand j’étais seul avec les enfants, ils savaient que je n’acceptais pas tout, surtout pas de chicanes… Quand on jouait, j’étais un autre enfant; mais quand j’étais le père, j’étais le boss.
Le sexe et la vie.
Je travaillais avec un ami à créer une charte pour l’école libre. J’ai dû me rappeler que la théorie est une chose, la pratique en est une autre. Je me croyais «flyé», je me suis vite aperçu qu’il y en avait d’autres, encore plus radicaux que moi.
En principe, je n’avais aucune limite à la liberté, sauf la violence ; mais j’avais oublié un facteur fondamental : la liberté n’a aucun sens si elle n’est pas guidée par la responsabilité.
Sur le plan sexuel, les interdits me paraissaient encore plus stupides que jamais. Comment peut-on croire qu’un dieu eut assez de temps à perdre pour nous imposer la manière selon laquelle on utilisera notre sexe. C’est complètement ridicule.
Les religieux peuvent claironner sur tous les toits que dieu leur a révélé. C’est complètement idiot. Est-ce un processus schizophrénique? Dieu serait-il un macho?
La prétendue supériorité de l’esprit sur la matière est le fruit de l’ébullition du cerveau d’hommes qui ont été trop longtemps dans le désert, les gnostiques.
On sait aujourd’hui que la conscience naît aussi du matériel, donc, du corps. Si le «Big bang» a été une implosion de l’énergie électromagnétique contenue dans la matière stagnante supposément inerte, il n’y a pas eu de créateur ; mais une évolution normale de la matière. Ça confirmait ce que j’ai toujours pensé : la matière est éternelle, mais elle se transforme.
Quant à la libido, c’est l’énergie à la base de notre sexualité et ce qui a permis à la race humaine de survivre. Y aurait-il une vie animale sans la libido issue de notre génétique? Comme toutes les énergies, elle ne peut pas être éliminée dans la mort, elle ne fait que se transformer.
Les hommes religieux, incapables de se retenir devant les femmes, virent que ce rut masculin créait toutes sortes de jalousies qui pouvaient même aboutir au meurtre. Ils prétendirent que les femmes devenaient un paravent dans leur relation avec dieu. Donc, les femmes sont le mal, la tentation qui détourne les yeux de son dieu. La tentation étant toujours une femme ou par extension l’arrière-train d’un petit gars, parce que c’est plus serré, ils décrétèrent que vouloir une femme en dehors du mariage, c’était péché. Les petits gars, grâce à l’initiation, était pour certains la sortie ou le trou de secours.
L’orientation sexuelle n’est pas une invention : c’est la définition de ce qui nous fait vibrer aux autres. Pire, les religieux manigancèrent des règles supposément divines, s’attribuant le pouvoir absolu de l’homme sur la femme. Mais, sans la sexualité, la race s’éteint. Comment gérer ces facteurs sur le plan de toute une société? Comment diviser les tâches entre les hommes et les femmes?
C’est un peu stupide, à mon avis, de décréter que telle activité est le propre d’un homme, si la femme peut la faire tout aussi bien. Pourquoi un homme ne peut-il pas s’occuper aussi bien des enfants à la maison qu’une femme? Pourquoi n’avons-nous pas le choix? Des conventions qu’on a placé sur le dos de Dieu ou d’Allah, c’est la même chose. Pour qu’elles soient respectées, on en a fait des règles sociales strictes.
On est même devenu assez fou pour diviser les hommes des femmes. Par contre, on doit admettre qu’un homme comprend mieux un homme et une femme, une femme. Si deux femmes peuvent pourtant se promener la main dans la main, sous prétexte que c’est charmant, dès qu’il s’agit de deux hommes, c’est un scandale. On appelle ça les conventions, la mode, mais c’est de l’hypocrisie. Combien d’annonces publicitaires dans lesquelles on présente un petit gars de six à dix ans à la recherche de sa petite blonde, pour influer les jeunes qui les regardent, alors que l’on sait qu’à cette âge, tous les petits gars normaux se fichent carrément des filles. On combat ainsi l’homosexualité. Hypocrisie, mais c’est quand même ça.
Là, où j’avais de réticences, c’était sur le plan scolaire. S’il est vrai qu’un jeune laissé libre récupère très vite, le jeune a besoin d’être orienté dans ses recherches et les connaissances qui le conduisent à une réponse spécifique. Comment savoir quelles notions il faut pour pouvoir exercer tel métier, si personne n’est là pour te guider. Qu’on aime ça ou pas, savoir lire et écrire, c’est essentiel. Mais, j’étais minoritaire. Je ne participais pas directement à l’élaboration de la philosophie de l’école, je passais par l’intermédiaire de Suzanne et un éducateur de l’institution pour apporter mon point de vue.
Puis, on a décidé de construire la Maison des enfants, là, où les enfants seraient maîtres absolus. Les adultes ne pouvaient même pas pénétrer dans l’école sans la permission des enfants.
J’ai travaillé comme un fou à la construction physique de cette école et à élaborer la publicité entourant son ouverture. Je revenais crevé à la maison. Ma libido s’en ressentait aussi. Les séances prolongées au lit m’intéressaient beaucoup moins.
Pourquoi les institutions scolaires ont toujours privilégié les sports et la prière? Pour que les jeunes ne sentent pas trop leurs démangeaisons naturelles. Contrairement à ce qui se passait en Suède, je m’opposais aux séances collectives de masturbation. Les jeunes doivent répondre à leur réalité personnelle, ils n’ont pas besoin de pratiquer en classe. Je trouvais ça exagéré. Remarquez que ce devait être très beau à voir . Cet extrême est presqu’aussi fou que notre silence québécois sur tout ce qui touche au sexe des mineurs.