Radioactif 189
Radioactif 189
08 Octobre 2007
Arrivée à Lac-Mégantic.
J’avais 17 ans quand je suis arrivé à Lac-Mégantic. Le bureau de la Tribune était situé face à l’hôtel Queens.
C’était un vieux, bureau, laid, pas très propre. Heureusement, à l’arrière, il y avait assez de place pour que je puisse y aménager ma chambre. On y avait accès par la porte en plein centre du mur arrière du bureau.
En plus d’écrire, je devais m’occuper des camelots ou de la personne qui en avait la charge. J’étais le grand patron. Ça se passait il y a plus de 40 ans, alors si ma mémoire flanche, je m’en excuse.
Le journaliste Yvon Dallaire se fera sûrement un grand plaisir de me ramener à la réalité. Dans son premier article sur son ami Breton qui devint mon adjoint, si on peut dire, il y avait des inexactitudes très faciles à comprendre puisqu’il ne connaissait que lui.
Nous nous sommes connus bien plus tard. La mémoire est une faculté qui oublie ou qui choisit. Mon frère cadet, Denis est venu me trouver, mais je ne me rappelle pas pourquoi et dans quelles circonstances. Il avait trouvé un travail, je crois.
À cette époque, je n’avais pas de blonde. Je n’y pensais même pas. Les petits gars m’intéressaient déjà plus, mais ça se passait en cachette ainsi que les aventures rarissimes qui ont marqué à jamais mon imaginaire dans le meilleur des sens.
Comme je l’ai dit j’étais trop naïf pour complètement comprendre le monde des adultes et de leur frayeur du sexe. Ils pensent comme si quelqu’un a pu déjà être blessé de jouir. Bien évidemment, l’atmosphère puritaine conduit à l’hypocrisie d’où on ne se vantait pas de ses écarts.
On était ignorant, mais on n’était pas fou. Ce qui ne m’empêchait pas d’être très religieux. Mon directeur de conscience était d’ailleurs un dirigeant des mouvements secrets religieux. C’est lui qui m’a introduit à la lecture de Confiance à la divine Providence. La pensée positive ?
Il montrait tellement de compassion à mes désirs et de curiosité quant à mes luttes titanesques pour demeurer chaste que j’avais de la misère à lui expliquer mes passions. J’ai parfois cru que je devais lui montrer l’objet de mes frénésies pour qu’il comprenne ce que je disais ou que je comprenne de ce à quoi qu’il voulait me parler.
Je n’étais pas nono, mais des questions, genre es-tu circoncis, me dépassait. On n’employait jamais ce vocabulaire.
J’étais l’image parfaite de notre société d’antan. Il fallait essayer de tout deviner.
J’étais tellement imbu de mon métier de journaliste, que je n’avais même pas le temps de penser à me masturber. Du petit complexé, j’étais passé à celui qui est bien fier d’être ce qu’il est.