Un sourire d’enfer 50
(Pour adultes seulement)
Je lisais dans la cuisine, les jeunes jouaient au strip tease ou au docteur dans leur chambre.
Je respectais le code de discipline de l’école libre : ne jamais intervenir, sinon pour des raisons de violence afin de s’assurer que personne ne soit blessé. On n’a pas tardé à proposer à ce que je sois inclus dans le cercle des jeux en cours.
— Jean n’est pas comme les autres, entendais-je. Il va vouloir jouer avec nous et nous monter sa bizoune.
J’étais bouleversé, même si en principe selon ma nature, cela me faisait plaisir, j’hésitais. Que doit-on faire dans un tel cas ? On prêche la liberté, mais dès qu’il faut la vivre, ça prend une toute autre dimension. Ce n’était pas mon invitation, mais la leur. J’ai essayé de créer un moyen pour m’en sortir.
— Je me déculotte que si vous vous déculottez aussi.
L’ambiance d’excitation et de curiosité était refroidie, avant de disparaître complètement, mais Réjean relança, devant mes hésitations :
— Tu le fais, je le fais.
Je me sentais pris au piège. J’étais aussi curieux que lui. Je désirais lui voir autant qu’il voulait me la voir.
— Si je le fais, tu ne le feras pas. Je me suis déjà fait avoir comme ça. J’étais sûr que Réjean abandonnerait la partie.
Les autres criaient à Réjean de dire oui. Il a longuement hésité à son tour, puis il baissa ses culottes jusqu’aux genoux. Il me regardait tout gêné.
— Pis toué !
Je n’avais plus le choix : si je me dégonflais, j’étais un hypocrite, pire un menteur ; si je ne faisais pas comme lui. Je devais trouver moyen que ça n’aille pas plus loin.
Je me suis exécuté en toute vitesse. Je pouvais d’autant plus aller vite que je ne portais pas de sous-vêtement. Je n’ai rien dans le pantalon pour effrayer qui que ce soit, les jeunes sont déjà presque tous déjà aussi bien bâtis que moi. Les yeux avaient quitté Réjean et se concentraient sur moi. J’ai fait valser mon petit « boutte » en descendant mon pantalon, question de montrer qu’il n’y a rien là et j’ai remonté mes culottes en vitesse.
— Ça ne te fait rien d’être nu ?
— Pourquoi ça me ferait quelque chose ? C’est agréable. Le zizi, c’est un morceau de chair comme un autre.
— C’est péché.
— C’est de la folie. Avant tu pouvais être damné parce que tu mangeais de la viande le vendredi. Aujourd’hui, il n’en est plus question. Pourtant, rien ne justifie ce changement. Ce sont les curés qui ont inventé les péchés. Il n’y a rien de mal à être nu. Pourquoi serait-il péché d’admirer un corps que Dieu a pris tant de mal à créer ?
— T’aime ça jouer aux fesses ?
— Oui, surtout quand on est beaux comme vous.
— Un bonhomme m’a dit qu’il me donnerait deux piastres si je lui faisais une fellation. Tu aimes ça, toi ?
— Je comprends j’adore ça, mais quant à moi c’est plus agréable de le faire que de se le faire faire,
— Tu me donnes deux piastres et je vais me laisser faire. L’autre fois, ce fut bien le fun.
— Je ne paye jamais. Si tu joues aux fesses, il faut que ce soit parce que tu aimes ça. C’est bien trop important pour faire cela pour de l’argent.
Je ne voulais pas passer la soirée à refuser les invitations. Même un saint peut flancher. Cela me tentait trop pour respecter plus longtemps ce scrupule, d’autant plus que je n’ai rien contre la prostitution individuelle, en autant que cela ne t’humilie pas.
Je me suis forcé à trouver vite un moyen pour changer la conversation.
Nous avons passé le reste de la soirée à jouer à des charades.
Les petits venaient s’asseoir sur moi à tour de rôle quand ça leur disait. J’évitais de les inviter. Je profitais de l’esprit de liberté qui se répandait. Je serais très hypocrite de dire le contraire ou d’affirmer que ça ne me plaisait pas.
Réjean est venu s’asseoir sur moi. Je me suis aperçu qu’il aurait pu être accusé au hockey de bâton trop élevé.
Réjean me regardait les yeux en feu, le sourire encore plus beau que celui de la Joconde. Il essayait en agitant les traits de son visage d’indiquer à Daniel de me regarder, ce qui déchaînait les rires chez Daniel. Alain essayait de comprendre ce qui se passait. Il ne pouvait pas nous voir, à cause d’une chaise dans son champ de vision. Réjean préférait s’asseoir sur moi plutôt que d’aller mimer à son tour comme tous les autres. Il ne voulait pas prendre la chance de perdre sa place.
Quand ce fut mon tour, je me suis rendu près du sofa où Patrick et Alain étaient assis. J’ai fait semblant de les saisir et Alain m’a écarté la main, en ajoutant de ne pas le toucher. Je n’y avais pas songé. Je l’ai regardé étonné.
— Tiens, un autre scrupuleux comme Patrick !
Patrick me regardait les yeux en feu. Il était ravi que je le replace au centre du jeu et de mes commentaires. J’ai fini mon mime et je suis retourné m’asseoir. Réjean est vite venu reprendre sa place.
Luc et Daniel voulaient bien savoir si Suzanne partageait mon ouverture d’esprit. Je leur ai dit que c’était leur problème de le découvrir, en leur soufflant une solution. . Je n’aurais jamais cru pouvoir bénéficier d’une telle ouverture d’esprit, même si je sais d’expérience que les jeunes en profitent dès qu’ils sentent qu’ils peuvent agir à leur guise. Les gestes amourajeux sont toujours consentis ou presque. Cette liberté élimine les dangers de violence.
Les jeunes espéraient maintenant voir les seins de Suzanne. Je n’ai pas découragé leur curiosité, bien au contraire. Pourquoi aurions-nous accepté de vivre le contraire de ce que l’on pensait ? Nous assumions pleinement cette éducation libre et je me comportais en véritable apôtre de ce nouvel Évangile.
Sachant que l’on dormait nus, les jeunes sont revenus souvent, le matin, dans l’espoir de nous prendre lorsque nous étions nus. Malheureusement, pour eux, l’occasion ne se présentait pas aussi souvent qu’il l’aurait souhaité. Si nous ne refusions pas de les voir vouloir vivre la liberté sexuelle, nous ne les provoquions pas. Suzanne leur a souvent demandé avec insistance de ne pas se présenter à la porte le matin et de respecter notre intimité.
Cette ouverture d’esprit amenait les jeunes à me raconter leurs expériences. Comment ils s’y prenaient pour grimper et aller voir par un petit trou les danseuses nues dans un club situé pas loin d’où ils demeuraient. Il me parlait du vieux qui leur donnait une piastre à tous les jours.
À la toilette, Réjean est venu à ma grande surprise pisser à côté de moi. Je me suis aperçu qu’il était gêné et inquiet d’avoir le pénis aussi croche. C’était son moyen de m’en parler puisqu’il savait que je n’en ferais pas un drame. C’était un problème très grave pour lui. Nous avons échangé sur le sujet, mais comment lui permettre d’avoir un examen médical puisque normalement ça ne me regarde pas et que je ne suis pas supposé le savoir.
À mon avis, il en avait sérieusement besoin. La liberté sexuelle permet aux jeunes de parler de leur problème à ceux en qui ils ont confiance,