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Un sourire d’enfer 40

mars 22, 2023

Un sourire d’enfer  40

Quand nous devions recevoir notre chèque, ce fut toute une déception.  La grève de la poste paralysait tous les services.  Comment survivre ?  C’était déjà un miracle d’avoir tenu jusque-là.  Cet événement m’a cependant permis de voir comment les autorités me saisissaient :

— Tu n’as qu’à téléphoner à ton chum et lui demander de régler la grève plus vite.    

 — Quel chum ?

— Le premier ministre du Canada, ton ami Trudeau, voyons !

J’oubliais facilement cette vision bien particulière des gens de l’Ouest.  À leur avis, Pierre-E. Trudeau était le seul vrai et unique chef du FLQ.  C’est une bien bizarre idée. Trudeau a beau être devenu un conservateur libéral, il demeure un leader antinationaliste québécois.  La nomination du dernier gouverneur général le démontre bien. 

Les libéraux sont prêts à se liguer avec la go-gauche et l’extrême droite dirigée par Claude Ryan pour battre l’indépendance du Québec.

Certains anglophones sont tellement racistes qu’ils n’arrivent pas à comprendre que Trudeau a vendu le Québec pour un plat de lentilles depuis belle lurette 

Pour eux, il suffit que Trudeau porte un nom français pour le haïr.  C’était d’un ridicule absolu.  Trudeau est haï par les nationalistes québécois, donc, ce n’est sûrement pas le chef de file nationaliste québécois. 

J’avoue que bien des Québécois se sont un jour demandé si Trudeau ne s’est pas fait élire pour écœurer les Québécois et ainsi les aider à prendre conscience de leurs contradictions et accéder plus vite à l’indépendance. 

C’était l’avis des anglophones d’où ceux-ci le détestaient autant.  Trudeau pour un Anglais, c’est le suprême affront.  C’est le francophone au pouvoir, le francophone qui réussit, là où échouent tous les anglophones.  C’est humiliant pour un groupe ethnique qui se croit supérieur.  Plus les années passent, plus c’est évident.

Cette vie joyeuse m’a permis de rêver de faire renaître l’émission radiophonique francophone, qui éblouissait les ondes à Dawson Creek. 

J’ai donc rencontré un groupe de francophones pour discuter de l’assimilation et essayer de comprendre comment elle se fait et comment s’y opposer. 

Le principal problème des francophones de l’Ouest : ils doivent payer pour étudier dans leur langue.  Le Québec est la seule province à fournir un réseau d’écoles bilingues, un réseau où souvent les anglophones ont même plus d’avantages que la majorité francophone.  
 
Pour suivre des cours universitaires, les jeunes de l’Ouest doivent s’expatrier.  Pourquoi? Pour revenir dans un pays qui, d’une autre langue et d’une autre culture, refuse leurs diplômes et leur compétence. 

Parce que tu es un francophone, tu es perpétuellement un immigrant dans ton propre pays, le Canada.  Tu es consacré par ta culture à être un « inférieur ».  Les bonnes jobs, ce sont les Anglais qui les ont.  C’est l’essentiel du problème.  Le bilinguisme sert à cacher cette réalité.

Pour faire croire dans le bilinguisme, il faut bien lâcher des miettes: dans les hebdos, parfois à la radio. 

En refusant la culture québécoise et en ne présentant que du western, les jeunes sont sans cesse en état culturel de minoritaires.  Comment ne pas avoir honte d’une culture aussi maigre ?  Comment s’intéresser au problème en rejetant le Québec, la voix française en Amérique ? La France a d’autres problèmes.  Sur le plan social, elle est même cent ans en arrière du Québec. C’est un pays figé.  Plutôt que de passer pour des arriérés les petits francophones s’anglicisent.  

Avec le bilinguisme, il ne reste plus au fédéral que d’attendre que s’éteignent les francophones de l’Ouest et que le bilinguisme au Québec mine assez la francité pour qu’il passe aussi au broyeur de l’assimilation.
  Tout devient clair.

Ce n’est pas pour rien que la radio francophone présente autant de succès américains et anglais dans le domaine de la musique.  L’assimilation passe par le chemin de l’oreille, de l’âme.  Il faut amener l’individu à choisir l’anglais pour améliorer son standard social, sa fierté.  Les communications ont pour objet d’angliciser le Québec à long terme.

Je voulais organiser une émission pour faire renaître chez les jeunes francophones la fierté de leur culture, une culture bien supérieure à tout ce qui existe en terre du Canada anglais. 

Si le chef du département cherchait tous les moyens et toutes les raisons pour me tomber dessus, la chaleur des jeunes compensait bien.

Burney, pour sa part, me collait de plus en plus comme une mouche.  Je lui ai raconté les plaisirs de la vie de candidat Rhinocéros alors qu’en échange, il me raconta sa candidature dans un parti d’extrême-droite.  J’étais de plus en plus certain qu’il était indicateur de la GRC. 


Je ne lui ai pas caché mon amourajoie.  Je l’ai même invité à m’accompagner à la piscine pour rencontrer mes petits amis.  Il jouissait déjà de sa capacité à me faire prendre sur le fait. 

Malheureusement pour lui, dès que j’ai mis les orteils à l’eau, une dizaine de jeunes me sautaient dessus, aux rires de leurs parents qui nous observaient.  La décence scrupuleuse est une paranoïa religieuse, une forme de schizophrénie, un délire entretenu depuis l’enfance qui nous répète que nous sommes pécheurs.  On entretient ainsi la peur de la mort, l’ultime punition étant l’enfer.  Le jugement est même double : particulier et général. 

Ces jeux avec les petits Indiens me rendaient le plus heureux des humains.  Ils n’ont pas du tout plu à Burney qui a quitté la piscine ouvertement en colère.  Ces fous de la victimologie quand ils se rendent compte qu’ils se trompent préfèrent ne rien voir, ne rien écouter, conserver leur idée que ces pauvres enfants souffrent quand ils jouissent.

Tout allait pour le mieux quand j’ai reçu une lettre voulant que Jimmy et tout son groupe d’amis soient en prison.  J’étais seul à parler anglais, aussi j’ai cru de mon devoir d’ami de me rendre à Vancouver.  Être en prison, à plus de 5,000 milles de chez toi, dans un pays étranger et une langue étrangère, ce doit être affreux.  Au nom de l’amitié, je ne pouvais pas rester égoïstement à Dawson Creek. Je suis descendu sur le pouce le plus vite possible à Vancouver.


Je n’avais pas d’endroit où me rendre à Vancouver.  Je ne voulais pas coucher encore une fois sur le plancher d’un terrain de stationnement de peur de rattraper des poux. 

Je me suis dirigé vers un club fréquenté par des Québécois.  Comme prévu, j’y ai rencontré des amis de Jimmy qui, eux, n’étaient pas en tôle.  Ceux-ci étaient tout particulièrement excités par l’arrivée d’une belle fille de seize ans environ, venue du Québec. Nancy, après avoir absorbé quelques comprimés de drogue, était partie sur le pouce.  Un voyage sans but, ni itinéraire. 

J’ai discuté près d’une heure avec les copains, sans attacher d’importance à la nouvelle venue, sans manifester mon intérêt pour elle.  Cette indifférence a eu raison de sa curiosité.  Pourtant, je l’avais observée depuis son arrivée.  Je la trouvais fort belle.

— Tu n’as pas l’air d’aimer les femmes ?

— Je n’ai rien contre les femmes, ce sont des êtres humains. Elles ne m’intéressent tout simplement pas.  J’aime les gars.

 — C’est contre-nature…

— Ce doit être pour cette raison qu’il existe des gars comme moi depuis le début de l’humanité.  En Grèce comme à Rome, le sommet de l’amour a toujours été la passion de l’adulte pour son privilégié.  Un homme comprend mieux un autre homme.  Ce sont les institutions économiques qui ont inventé la nécessité d’être un couple hétéro. 

Dans notre société, on force les jeunes à devenir hétérosexuels.  Si tu n’obéis pas à ce moule, tu es la risée de tout le monde.  Vers dix ans, tes parents te pointent du doigt si tu n’as pas une petite blonde. 

Pourtant, avec la surpopulation, les sociétés devront finir par admettre que l’orientation sexuelle est en grande partie culturelle et que l’homosexualité est la solution la plus respectable et la plus naturelle contre la surpopulation.  Les gens vont se lasser des guerres pour dépeupler et équilibrer les marchés.  Les peuples n’ont plus autant besoin de soldats et l’homme mérite plus que d’être une fonction sociale ou guerrière.

 — Il n’y aura plus d’enfants ?
 
— Il y en aura toujours, mais l’amour ne sera plus intimement lié à la procréation.  Quand ces distinctions naturelles seront faites, il importera peu que la passion éclose entre gens de sexes différents ou du même sexe. L’amour est au-delà de la couchette. Le plaisir est une chose, l’amour en est une autre.

Les enfants ne seront plus considérés comme un symbole de réussite.  Les adultes s’en occuperont par amour.  Ce ne seront plus leur simple projection pour rêver s’immortaliser.  

Combien d’hommes se marient pour échapper à l’opinion des autres ?  Combien d’hétéros ne connaissaient rien aux femmes, les méprisent même, en faisant semblant d’être normaux alors qu’ils se seraient mieux réalisés en tant qu’être humain s’ils avaient été seul ou avec un autre homme ?  Il est urgent que l’on recommence à reconsidérer la femme comme un être humain, non plus comme un simple rôle social.  Celle qui donne des enfants. 

J’ai de la difficulté à comprendre les femmes.  Je leur reproche leur masochisme, leur jalousie, leur obsession sexuelle, leur hystérie religieuse, leur hypocrisie pour dominer en se servant de leur capacité de pleurer pour te rendre coupable.  Il suffit pour une femme de pleurer pour faire ramper n’importe qui.  Elles crient contre leur état d’inférieures et pourtant elles se proclament toujours victimes.

Généralement, les femmes bénéficient d’une multitude de privilèges, dans nos lois civiles surtout, mais elles prétendent encore qu’elles sont exploitées.  Elles blâment les mâles pour leur faible salaire alors qu’elles sont contre les syndicats. Donc, elles encouragent les patrons à les exploiter.  Elles n’ont qu’à se syndicaliser comme les hommes.  Les femmes devront apprendre à accepter une critique constructive et cesser de se comporter toujours comme si elle était un être inférieur.  Elles ont un pouvoir qu’elles ne font que commencer à exercer.  

Les adultes refusent d’admettre que les jeunes ont une sexualité depuis leur naissance. Les jeunes se sentent.  Ils bandent et jouissent, même s’ils n’éjaculent pas encore. 

Les jeunes ont une approche plus saine de la sexualité que la majorité des adultes qui ont été élevés dans la croyance que le sexe est un péché en dehors de la procréation.  Ils ne voient pas le plaisir, la jouissance, comme un péché, mais comme une expérience de son propre développement. 

L’amitié est une toute autre chose, mais l’un n’empêche pas l’autre. Tu peux être ami avec quelqu’un sans qu’il y ait du sexe. Comme disait Freud, il y a le côté génital et la tendresse, les sentiments.

Des jeunes ont déjà voulu se sauver de leur famille avec moi.  N’aurait-il pas été mieux avec moi ? Peut-être, mais ça ne se fait pas.  La famille est la base de notre société.  On pourrait dès la préadolescence avoir le droit de vivre indépendant, mais c’est bien plus hypothétique que réaliste.  Quel jeune pourrait assurer sa survie ? 

J’en ai aussi empêché quelques-uns de se suicider.  J’admets cependant que le rôle que je joue avec eux est très important.  Si je représente l’autorité et que je me permets de les inciter au sexe, je peux effectivement les briser.  La situation crée les règles de vie.

Il y a une très grande responsabilité quand on est amourajeux.  Il faut savoir vraiment écouter l’autre pour être certain que nos gestes ne les brisent pas, mais au contraire, les aident à se développer, à se connaître plus profondément.  Mon contact avec eux en est surtout  un de pur amour. Cet amour est partagé.

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